URL du billet: http://www.maannews.net/arb/ViewDetails.aspx?ID=500054
samedi 30 juin 2012
مرسي: نقف مع حقوق الشعب الفلسطيني وسنعمل على إتمام المصالحة
URL du billet: http://www.palinfo.com/site/pic/newsdetails.aspx?itemid=117833
مرسي: سنقف مع الشعب الفلسطيني ونعمل لإتمام المصالحة
URL du billet: http://www.alaqsavoice.ps/arabic/index.php?action=detail&id=97286
Les marches du vendredi en Cisjordanie refusent la rencontre d'Abbas avec Mofaz
URL du billet: http://www.ism-france.org/temoignages/Les-marches-du-vendredi-en-Cisjordanie-refusent-la-rencontre-d-Abbas-avec-Mofaz-article-17142
Articles en anglais sur la Palestine occupée / Samedi 30juin 2012
VIDEO | Confessions Of Collaborators فيالعملاء
فيلم العملاء
Video about collaborators with Israel in Gaza ( Arabic ) published by internal security service of Hamas
URL du billet: http://occupiedpalestine.wordpress.com/2012/06/28/video-%d9%81%d9%8a%d9%84%d9%85-%d8%a7%d9%84%d8%b9%d9%85%d9%84%d8%a7%d8%a1/
Official: Abbas-Mofaz meeting postponed indefinitely
URL du billet:http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=499870
Memo to J14 Movement: Social Justice Demands Ending Occupation
URL du billet:http://palestinechronicle.com/
The Never-Ending Negotiations
URL du billet: http://palestinechronicle.com/view_article_details.php?id=19381
Arrests of Palestinian children– ‘a boy in leg irons’ — is becoming a big story in UK
URL du billet: http://mondoweiss.net/2012/06/arrests-of-palestinian-children-a-boy-in-leg-irons-is-becoming-a-big-story-in-uk.html
24 Hours in Israeli Custody: The arrest of an American activist in Palestine

Dooler Campbell protesting in Beit Ommar, near the Karmei Tsur settlement. June 23, 2012
URL du billet: http://mondoweiss.net/2012/06/24-hours-in-israeli-custody-the-arrest-of-an-american-activist-in-palestine.html
IDF takes over Palestinian village for live-fire training exercises

Al-Aqada's Mayor Haj Sami Sadeq watches as the Israeli army enters the village to resume live-fire training exercises, June 27, 2012. (Photo: The Rebuilding Alliance)
URL du billet: http://mondoweiss.net/2012/06/idf-takes-over-palestinian-village-for-live-fire-training-exercises.html
Lessons from Gaza
فيلم العملاء
Video about collaborators with Israel in Gaza ( Arabic ) published by internal security service of Hamas
Gaza’s Interior Ministry Publishes Confessions Of Collaborators
URL du billet: http://occupiedpalestine.wordpress.com/2012/06/28/video-%d9%81%d9%8a%d9%84%d9%85-%d8%a7%d9%84%d8%b9%d9%85%d9%84%d8%a7%d8%a1/
Official: Abbas-Mofaz meeting postponed indefinitely
URL du billet:http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=499870
Memo to J14 Movement: Social Justice Demands Ending Occupation
J14 must widen the scope of its demands.
(Activestills)
URL du billet:http://palestinechronicle.com/
The Never-Ending Negotiations
URL du billet: http://palestinechronicle.com/view_article_details.php?id=19381
Arrests of Palestinian children– ‘a boy in leg irons’ — is becoming a big story in UK
URL du billet: http://mondoweiss.net/2012/06/arrests-of-palestinian-children-a-boy-in-leg-irons-is-becoming-a-big-story-in-uk.html
24 Hours in Israeli Custody: The arrest of an American activist in Palestine
Dooler Campbell protesting in Beit Ommar, near the Karmei Tsur settlement. June 23, 2012
URL du billet: http://mondoweiss.net/2012/06/24-hours-in-israeli-custody-the-arrest-of-an-american-activist-in-palestine.html
IDF takes over Palestinian village for live-fire training exercises
Al-Aqada's Mayor Haj Sami Sadeq watches as the Israeli army enters the village to resume live-fire training exercises, June 27, 2012. (Photo: The Rebuilding Alliance)
Lessons from Gaza
A Palestinian boy stands in front of a gate leading to the Erez
crossing between Israel and Gaza during a protest calling for
an end to Israel`s blockade. (MaanImages/Hatem Omar, File)
URL du billet: http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=499625
Group: 25 prisoners start hunger strike in Israel jail
URL du billet: http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=499525
Group: 25 prisoners start hunger strike in Israel jail
KATTAN: The Gas Fields off Gaza: A Gift or a Curse?
URL du billet: http://www.australiansforpalestine.net/65581
OCHA: Israel razed 15 Palestinian structures in one week
URL du billet: http://www.palestine-info.co.uk/en/default.aspx?xyz=U6Qq7k%2bcOd87MDI46m9rUxJEpMO%2bi1s7DBJQl65MciRQ6zEfFWbnW7idwaaQytxjeEYiT%2fw20Qlgo2sBiOSKF5NDq2GVPWPDsjZD0DKhQcTOtoOfAmHhEJjrLSoZ8CDiJIgvRxKd4xc%3d
OCHA: Israel razed 15 Palestinian structures in one week
URL du billet: http://www.palestine-info.co.uk/en/default.aspx?xyz=U6Qq7k%2bcOd87MDI46m9rUxJEpMO%2bi1s7DBJQl65MciRQ6zEfFWbnW7idwaaQytxjeEYiT%2fw20Qlgo2sBiOSKF5NDq2GVPWPDsjZD0DKhQcTOtoOfAmHhEJjrLSoZ8CDiJIgvRxKd4xc%3d
Le prisonnier Nader Sadqa Assamari a été menacé et torturé
Publié le 27 juin 2012 sur le site france-palestine.org
Ramallah – Al-Quds- de Najib Farraj
Le prisonnier Nader Mamdouh Salah Sadqa Assamari, du mont Garizim à Naplouse, âgé de 34 ans a été condamnés en date du 17÷8÷2004 à une peine de prison, 6 fois à perpétuité pour « résistance à l’occupation israélienne ». Il a été soumis à différents types d’abus et de tortures durant les interrogatoires par les autorités d’occupations israéliennes. L’arrestation d’un jeune Juif appartenant à la communauté samaritaine a été une grande surprise pour la sécurité israélienne du coup, ils ont voulu en faire un exemple pour d’autres, il a été menacé et torturé pendant plusieurs jours.
Un rapport publié par le ministère des Affaires des Prisonniers indique que les Samaritains sont une petite communauté de près de 670 personnes, réparties entre la ville de Naplouse et le Holon près de Tel Aviv, se considèrent comme des Palestiniens. Ils ont toujours vécus avec les Palestiniens à Naplouse qu’ils considèrent comme leur ville sainte. Ils ont leurs commerces, et un grand nombre d’entre eux travaillent dans les institutions gouvernementales et privées. Ils avaient un parlementaire au sein du Conseil législatif palestinien.
Le prisonnier Nader Assamari qui vit avec les membres de sa communauté, la souffrance du peuple palestinien, l’oppression, les assassinats, les destructions et toutes les atrocités commises par les soldats de l’occupation en particulier en 2002 lors de l’invasion israélienne, ne pouvait supporter tout cela, il a choisi la voix de la justice et la liberté en se joignant à la résistance palestinienne, en réponse à la violation israélienne et ses crimes.
Le rapport souligne que : "Nader et les membres de sa communauté ont leurs convictions et leurs commandements qui diffèrent des commandements du reste des Juifs. La religion juives samaritaine diffère de la religion juive, ils se considèrent comme Palestiniens, ils croient fermement que Jérusalem est la capitale éternelle d’un Etat palestinien. En dépit de leur citoyenneté israélienne, ils réclament la fin de l’occupation et l’établissement un Etat palestinien indépendant, et de vivre dans la ville de Naplouse, avec le reste de la population. "
Nader a terminé ses études primaires à l’école Ibn Al-Haytham à Naplouse, puis ses études secondaires à l’école du roi Talal, et a rejoint An-Najah National University section archéologie.
Il était l’un des militants les plus en vue dans les rangs du mouvement étudiant, il participait à toutes les manifestations contre l’occupation pour soutenir le peuple palestinien. Aujourd’hui détenu dans la prison de Gilboa, il partage avec une volonté inébranlable le combat de tous les prisonniers pour la liberté et la dignité.
Nader Assamari n’a pas oublié que sa communauté a payé le prix fort face à l’occupation, ils ont été assiégés et affamés, et soumis à des humiliations aux check-points. Karim Sadka, un autre membre de leur communauté a passé 7ans dans les prisons de l’occupation.
Traduction : Moncef CHAHED, Groupe de travail prisonniers
URL du billet: http://www.france-palestine.org/Le-prisonnier-Nader-Sadqa-Assamari
Israël Concours de beauté Miss survivante de l'Holocauste
Crédit photo : AFP
La gagnante est une femme de 79 ans, Hava Hershkovitz, qui a passé trois ans dans un camp de détention de l'Union soviétique.
Controverse après l'élection de Miss rescapée de la Shoah
URL du billet: http://www.slate.fr/lien/58677/election-miss-shoah
Témoignage d’une ancienne soldate...
Publié le samedi 30 juin 2012 sur le site info-palestine.net
Youtube
Youtube
...maintenant membre de "Breaking the silence" :
Veille citoyenne du CCY / Samedi 30 juin 2012
Réponse du président de la Fédération française de football à Richard Prasquier
URL du billet: http://www.crif.org/fr/lecrifenaction/r%C3%A9ponse-du-pr%C3%A9sident-de-la-f%C3%A9d%C3%A9ration-fran%C3%A7aise-de-football-%C3%A0-richard-prasquier/31819
Des fiches secrètes sur des salariés de la Sécu
URL du billet: http://www.ladepeche.fr/article/2012/06/30/1391004-des-fiches-secretes-sur-des-salaries-de-la-secu.html
Réactions au papotage de Laurent Fabius à Sciences Pipo
URL du billet: http://cercledesvolontaires.wordpress.com/2012/06/30/reactions-au-papotage-de-laurent-fabius-a-science-pipo/
خطاب الرئيس محمد مرسى في ميدان التحرير كامل
Egypt's first Islamist president takes oath
URL du billet: http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=500007
URL du billet: http://www.crif.org/fr/lecrifenaction/r%C3%A9ponse-du-pr%C3%A9sident-de-la-f%C3%A9d%C3%A9ration-fran%C3%A7aise-de-football-%C3%A0-richard-prasquier/31819
Des fiches secrètes sur des salariés de la Sécu
URL du billet: http://www.ladepeche.fr/article/2012/06/30/1391004-des-fiches-secretes-sur-des-salaries-de-la-secu.html
Réactions au papotage de Laurent Fabius à Sciences Pipo
URL du billet: http://cercledesvolontaires.wordpress.com/2012/06/30/reactions-au-papotage-de-laurent-fabius-a-science-pipo/
خطاب الرئيس محمد مرسى في ميدان التحرير كامل
Egypt's first Islamist president takes oath
Egypt`s first Islamist president Mohamed Mursi attends his swearing
in ceremony in this still image from a video footage in Cairo June 30,
2012.Mursi took his oath of office on Saturday, ending six decades of
rule by military men but the generals in charge since Hosni Mubarak
was ousted have already curbed his powers. (Reuters/Egypt TV)
in ceremony in this still image from a video footage in Cairo June 30,
2012.Mursi took his oath of office on Saturday, ending six decades of
rule by military men but the generals in charge since Hosni Mubarak
was ousted have already curbed his powers. (Reuters/Egypt TV)
URL du billet: http://www.maannews.net/eng/ViewDetails.aspx?ID=500007
L'Unesco inscrit en "urgence" Bethléem au Patrimoine mondial
Publié le 29 juin 2012 sur le site ladepeche.fr
URL du billet: http://www.ladepeche.fr/article/2012/06/29/1390368-l-unesco-inscrit-en-urgence-bethleem-au-patrimoine-mondial.html
L'Unesco a inscrit vendredi le site de l'église de la Nativité de Bethléem (Cisjordanie) au Patrimoine mondial, usant d'une procédure d'urgence qui a suscité une vive protestation d'Israël, lors d'une session à Saint-Pétersbourg (nord-ouest de la Russie).
Le site du "Lieu de naissance de Jésus", comprenant également la route de pèlerinage, a été inscrit par 13 voix pour, 6 contre et 2 abstentions lors d'un vote secret des 21 membres du Comité du patrimoine, qui comprenaient cette année notamment la France, la Russie, l'Allemagne et le Japon.
L'annonce de l'inscription du site était incertaine à l'origine en raison des objections d'Israël, de l'enjeu politique et des avis défavorables d'experts.
A Ramallah, la présidence palestinienne s'est aussitôt félicitée.
"Cette reconnaissance par le monde des droits du peuple palestinien est une victoire pour notre cause et la justice", a déclaré à l'AFP Nabil Abou Roudeina, porte-parole du président Mahmoud Abbas.
Il s'agit du premier site palestinien inscrit sur la liste du Patrimoine mondial de l'Organisation des Nations unies pour l'éducation, la science et la culture.
Le délégué palestinien à Saint-Pétersbourg a estimé que la décision accordait aux Palestiniens leur "droit culturel à l'auto-détermination".
"Ces sites sont menacés de destruction totale par l'occupation israélienne, la construction du mur de séparation, à cause des sanctions israéliennes et des mesures prises pour opprimer l'identité palestinienne", a déclaré le délégué, dont le nom n'a pas été cité.
"Cela prouve que la communauté internationale dans son ensemble a l'intention de protéger la Palestine (...) et de s'assurer que l'Etat palestinien soit créé dans ses frontières de 1967 avec pour capitale Jérusalem est", a poursuivi le délégué.
Son homologue israélien a vivement réagi.
Les USA "profondément déçus"
"La décision qui vient d'être prise est absolument politique et constitue de notre point de vue une atteinte grave à la convention" du Patrimoine mondial, a-t-il déclaré.
Les Etats-Unis se sont également dits "profondément déçus", par la voix de leur ambassadeur auprès de l'Unesco, David Killion.
Ce "site est sacré pour tous les chrétiens" et l'Unesco "ne devrait pas être politisée", a-t-il déclaré dans un communiqué, relevant que la procédure d'urgence ne devait concerner que des sites menacés de destruction imminente.
Les Palestiniens, entrés à l'Unesco en octobre 2011 au terme d'un vote qui avait provoqué la colère des Israéliens et des Américains, avaient demandé cette procédure en arguant du "délabrement et de la dégradation de l'ensemble architectural", notamment du fait des "forces d'occupation" israéliennes.
Israël avait affirmé n'avoir "aucune objection" à l'inscription du site au Patrimoine mondial, mais avait contesté le recours à la procédure d'urgence, estimant que c'était "une façon de laisser entendre qu'Israël ne protégeait pas le site".
La candidature de Bethléem avait connu un revers avec l'avis défavorable des experts du Conseil international des monuments et des sites (Icomos), qui avaient recommandé à la Palestine de revoir son dossier et les mesures de conservation prévues.
Haut lieu de pèlerinage, Bethléem est le premier site touristique des Territoires palestiniens (deux millions de visiteurs en 2011). Datant de l'empereur romain Constantin, au IVe siècle et restaurée au VIe siècle sous Justinien, la basilique de la Nativité est l'un des sanctuaires les plus anciens de la chrétienté.
Le comité a également inscrit vendredi au Patrimoine mondial les "sites de l'évolution humaine du mont Carmel : les grottes de Nahal Me'arot/Wadi el-Mughara" (Israël), le "lagon sud des îles Chelbacheb" (Palaos), le "paysage culturel de la province de Bali : le système des subak en tant que manifestation de la philosophie du Tri Hita Karana" (Indonésie), et "Rabat, capitale moderne et ville historique : un patrimoine en partage" (Maroc).
Jeudi, le comité a placé Tombouctou, ville du nord du Mali aux mains des islamistes depuis la fin mars, sur la liste du patrimoine mondial en péril, et mardi, c'est le port marchand de Liverpool (Grande Bretagne) qui a été ajouté à cette liste en raison d'un vaste projet d'aménagement.
Trente-trois nouveaux sites étaient présentés au total pour être distingués pour leur "valeur universelle exceptionnelle" et s'ajouter à une liste déjà longue de 936 noms dans 153 pays, lors de la session qui se tient à Saint-Pétersbourg jusqu'au 6 juillet.
URL du billet: http://www.ladepeche.fr/article/2012/06/29/1390368-l-unesco-inscrit-en-urgence-bethleem-au-patrimoine-mondial.html
L’Eglise de la Nativité et la route de pèlerinage de Bethléem, Palestine, inscrite sur la Liste du patrimoine mondial ainsi que des sites en Israël, aux Palaos, en Indonésie et au Maroc
URL du billet: http://whc.unesco.org/fr/actualites/896
Je participe au challenge d´été de la campagne Soif de Justice
Publié le 30 juin 2012 sur le site .ism-france.org
Par Thirsting for Justice

Sur un toit d'Hébron, deux citernes percées par des tirs de l'armée d'occupation

De l'eau au compte-gouttes pour Hannan et sa famille

Hannan Ammashi (photo Michael Loadenthal)
Pourtant, la quantité d'eau fournie au camp est insuffisante, surtout en été, quand Mekorot coupe l´eau pendant plusieurs jours de suite.
Les colonies israéliennes à proximité ont continuellement accès à beaucoup d'eau, qui est utilisée pour irriguer des plantations de fruits et légumes destinés au marché d'exportation.
« Je reçois de l'eau du robinet deux fois par semaine », explique Hannan, « mais le réseau est vieux et l'eau est contaminée. Le réservoir principal est à ciel ouvert, et dedans il y a des oiseaux morts et aussi des insectes. »
La plupart des femmes de la coopérative se plaignent que leurs enfants souffrent souvent de diarrhée, et blâment la mauvaise qualité de l'eau.


Par Thirsting for Justice
Je vis sur 24 litres d'eau pendant 24 heures afin de sensibiliser sur le fait que beaucoup de Palestiniens sous occupation ne peuvent pas accéder à suffisamment d'eau. Ce montant doit être suffisant pour boire, cuisiner, laver et l'hygiène personnelle.
Pourquoi je prends part à ce défi
Il y a suffisamment d'eau dans les territoires Palestiniens occupés, mais des lois discriminatoires font en sorte que beaucoup de Palestiniens se retrouvent avec des quantités d´eau dérisoires.
• En tant que pouvoir occupant, le gouvernement israélien est responsable, en vertu du droit humanitaire international, du bien-être des Palestiniens, et doit s´assurer qu'ils ont un approvisionnement en eau adéquat. Israël contrôle toutes les sources d'eau douce en Cisjordanie , mais le gouvernement israélien a négligé cette obligation.
• Certaines communautés palestiniennes vivent avec seulement 20 litres d'eau par personne par jour. C'est à peine assez d'eau pour leurs besoins de base.
• L´eau courante est souvent coupée pendant plusieurs semaines durant l'été dans les villes palestiniennes comme Bethléem. Les résidents sont obligés d'acheter de l'eau auprès de fournisseurs privés israéliens à des prix plus élevés.
• Des communautés palestiniennes dépendantes de camions-citernes d'eau payent jusqu'à 4 fois plus que les communautés qui ont accès à l´eau courante, exacerbant leurs problèmes financiers.
• Certaines communautés dépendent de citernes collectant l'eau de pluie, souvent financées par des aides financières internationales, pour leur approvisionnement en eau. En 2011, l'armée israélienne a détruit en moyenne près de trois citernes par mois, et depuis lors, le taux de ces démolitions a augmenté.
Sur un toit d'Hébron, deux citernes percées par des tirs de l'armée d'occupation
A l'inverse :
• Environ un demi-million d'Israéliens vivent dans des colonies illégales situées à côté de communautés palestiniennes assoiffées. Les colons ont un accès illimité à l'eau, des pelouses bien arrosées et des piscines.
• Les colons israéliens dans des colonies telles que Ro'i dans la Vallée du Jourdain (photo ci-dessous) en Cisjordanie utilisent 20 fois plus d'eau que certaines communautés Palestiniennes.
De l'eau au compte-gouttes pour Hannan et sa famille
Hannan Ammashi a 6 enfants et est membre de la coopérative des femmes dans le camp de réfugiés d´Akbat Jaber à Jéricho. La majorité des 8000 Palestiniens qui vivent dans le camp souffrent de pénuries d'eau ; l'UNRWA, l'agence de l'ONU créée pour aider les réfugiés palestiniens, pompe l'eau d´une source voisine pour une partie du camp, mais la plupart de l'eau pour le camp est achetée de Mekorot, la compagnie nationale Israélienne des eaux.
Hannan Ammashi (photo Michael Loadenthal)
Pourtant, la quantité d'eau fournie au camp est insuffisante, surtout en été, quand Mekorot coupe l´eau pendant plusieurs jours de suite.
Les colonies israéliennes à proximité ont continuellement accès à beaucoup d'eau, qui est utilisée pour irriguer des plantations de fruits et légumes destinés au marché d'exportation.
« Je reçois de l'eau du robinet deux fois par semaine », explique Hannan, « mais le réseau est vieux et l'eau est contaminée. Le réservoir principal est à ciel ouvert, et dedans il y a des oiseaux morts et aussi des insectes. »
La plupart des femmes de la coopérative se plaignent que leurs enfants souffrent souvent de diarrhée, et blâment la mauvaise qualité de l'eau.
Hannan souffre de cette pénurie d'eau depuis plus de quatre ans, et est obligée d'acheter de l'eau auprès de fournisseurs privés, ce qui coûte 9 fois le montant qu'elle paie normalement — au total, 20% du revenu mensuel de son mari est dépensé rien que pour l'eau. Mais il n'y a pas assez de camions-citernes pour desservir l'ensemble du camp, et sa famille n'a souvent pas accès à l'eau du tout.
« Parfois, je dois attendre des jours pour faire la vaisselle », dit Hamman, « ou emprunter des seaux d'eau chez les voisins pour pouvoir utiliser les toilettes. Parfois, les gens dans le camp se battent, parce que certains ont plus d'eau que d'autres, et certains sont jaloux. »
Beaucoup de résidents d´Akbat Jaber ont quitté le camp à cause des pénuries d'eau, ajoute Hannan, qui envisage également de déménager vers un camp de réfugiés voisin où il y a plus d'eau disponible.
Lancée en mars 2011, la campagne Soif de Justice a pour but de mobiliser les personnes de conscience afin qu´elles demandent à leurs gouvernements de faire pression sur Israël, qui doit changer ses pratiques et respecter le droit international et les droits de l´Homme vis-à-vis des Palestiniens.
Les objectifs principaux de la campagne sont :
1. Qu´Israël respecte les droits à l´eau et à l´assainissement des Palestiniens ;
2. Que les Palestiniens aient le droit de développer leurs infrastructures d´eau et d'assainissement ;
3. Plus de responsabilité dans les cas de violations du droit international.
- Inscrivez-vous pour prendre part au challenge d'été en écrivant à : info@thirstingforjustice.org
- Visitez www.thirstingforjustice.org pour en savoir plus et prendre action.- Lisez les récits des participants au challenge d´été sur notre blog : www.thirstingforjustice.org- Envoyez-nous le récit de votre expérience, par un petit article, une photo ou une vidéo.- Ecrivez à vos députés pour dénoncer les violations israéliennes des droits des Palestiniens à l'eau et à l'assainissement, parlez-en sur votre page Facebook, à votre famille, à vos collègues, à vos amis.- Visitez le blog : http://palwaterchallenge.org/ où seront postés des informations et les expériences des participants à la campagne.
Source : Thirsting for Justice
Israël militarise son système éducatif
Publié le samedi 30 juin 2012 sur le site info-palestine
Jillian Kestler-Damours - Al-Jazeera
Les manuels scolaires avec des thèmes nationalistes portent de plus en plus préjudice au système éducatif, disent les analystes.
Le gouvernement sioniste encourage activement une plus grande militarisation de la société israélienne - Photo : AFP
Les filles israéliennes doivent-elles être empêchées de se mettre en couple avec des Palestiniens ?
Ce fut une des questions posées dans un nouveau guide pour la préparation aux examens en éducation civique dans les université israéliennes, et rédigé par une entreprise privée et approuvé par le ministère de l’éducation.
Une des réponses proposées était que les filles israéliennes devraient rester à l’écart des Palestiniens, parce que « les jeunes arabes constituent une menace pour la vie des jeunes filles juives » et que « les relations entre les jeunes hommes arabes et les jeunes femmes juives représentent une menace pour la majorité juive dans le pays ».
Bien que le guide en question ait été condamné pour encourager les stéréotypes racistes et l’incitation à la haine, de nombreux militants soutiennent qu’il n’est pas un phénomène isolé. En effet, ils affirment qu’il révèle un problème beaucoup plus profond et enraciné : l’ultra-nationalisme qui traverse le système éducatif israélien, et son impact négatif sur la jeunesse israélienne.
« Les manuels scolaires israéliens correspondent à toutes les catégories du discours raciste, à la fois verbal et visuel », a déclaré Nurit Peled-Elhanan, un professeur israélien spécialisé dans l’éducation à l’Université hébraïque de Jérusalem, et auteur de La Palestine dans les manuels scolaires israéliens : idéologie et propagande dans l’éducation.
Depuis les représentations stéréotypées et négatives des Palestiniens dans les manuels scolaires - à condition même qu’il y ait la moindre allusion à leur existence - jusqu’aux cartes erronées représentant les frontières d’Israël, en passant par la censure stricte sur ce que les citoyens palestiniens d’Israël sont autorisés à enseigner et apprendre, Peled-Elhanan explique que la quasi-totalité des sujets dans les programmes israéliens d’enseignement sont imprégnés d’un nationalisme exacerbé.
« On va revenir à ce qui caractérisait la recherche et l’éducation des années 1950 : un très bas niveau, un discours nationaliste, non-scientifique de présentation du monde, de nous, et de la situation politique dans la région, » ajoute Peled-Elhanan.
« Le but est d’éduquer les enfants de façon à en faire de bons soldats. Vous ne pouvez pas être un bon soldat si vous n’avez pas cette image d’un ennemi qui est un peu trouble ; il faut en savoir très peu sur ces gens, excepté qu’ils sont des ’problèmes’ et des ’menaces’. »
Militarisation de l’éducation
Les programmes gérés conjointement par le ministère israélien de l’éducation et l’armée israélienne existent en Israël depuis des années. Un nouveau programme, nommé Derekh Erekh [« chemin des valeurs »], a été présenté à la mi-juin et est destiné à inculquer le sens du devoir et de l’allégeance à l’État et à renforcer les liens entre les écoles israéliennes et l’armée.
« Les enseignants sont des appelés tout au long de leur vie », a déclaré le ministre de l’éducation Gideon Saar, membre du Likoud du Premier ministre Benjamin Netanyahu, alors qu’il présentait le programme. Il devrait être mis en œuvre dans des milliers d’écoles à travers le pays et il s’est vu allouer un budget annuel de 300 000 NIS (76 854 dollars US).
« Mes les attentes du système [éducatif] ne sont pas seulement dans le domaine de l’apprentissage, mais aussi dans celui des valeurs », aurait dit Sarre. « Encourager le service dans l’armée israélienne n’est pas une faveur que nous faisons à l’armée, mais une question de morale. »
En 2010, un directeur d’école secondaire dans le district de Tel-Aviv a dit avoir reçu des menaces de mort après avoir décidé de ne pas participer à un programme du même genre qui fait venir des colonels de l’armée israélienne dans les écoles pour encourager les étudiants à rejoindre l’armée et à signer pour un entraînement de combat.
Selon Sahar Vardi, un membre de New Profile, une organisation féministe qui encourage la démilitarisation de la société israélienne, la surabondance de symboles et de cérémonies militaires dans les écoles israélienne et dans la société rend naturelle la participation militaire chez les jeunes.
« [L’armée] doit être considérée comme quelque chose de violent et quelque chose qui, si elle est nécessaire, devrait être le dernier recours, mais la façon dont elle est vue en Israël en fait quelque chose de très naturel, c’est dans la vie de tous les jours », a déclaré Vardi , qui a refusé de faire son service militaire obligatoire en 2008.
« [Le système d’éducation enseigne aux jeunes que] ce que l’armée fait est bien, que la violence comme forme de résolution de problèmes est légitime. Ce n’est pas seulement légitime, mais aussi promu par la société », dit-elle.
En 2010, l’institut pour la recherche de la paix dans le Moyen-Orient (PRIME - Peace Research Institute in the Middle East) a publié un manuel intitulé Apprendre les uns des autres le récit historique. Rédigé par un groupe d’universitaires et d’historiens israéliens et palestiniens, le livre comprend les récits israéliens et palestiniens de divers événements historiques, et a laissé un espace vide ouvert sur chaque page pour que les élèves y écrivent leurs réflexions.
Le livre aborde des sujets tels que la Déclaration Balfour, la fondation d’Israël en 1948, et les deux Intifadas palestiniennes. Il a été utilisé dans un lycée israélien et deux lycées palestiniens avant d’être semble-t-il interdit par les deux ministères de l’éducation, israélien et palestinien [dans les Territoires Occupés].
Visites financées par l’État, de colonies
En plus de renforcer les liens avec l’armée, Sarre a annoncé l’an dernier qu’il voulait développer un programme montrant aux élèves « les racines historiques de l’Etat d’Israël dans la terre d’Israël ».
Ce programme comprend des visites dans des colonies israéliennes, y compris Shiloh, dans le nord de la Cisjordanie, près de Naplouse, le Tombeau des Patriarches au cœur de Hébron, et le parc archéologique la cité de David dans Silwan, un quartier palestinien de Jérusalem-Est.
« Il est bon de venir dans les colonies. Il est bon de les voir florissantes », a déclaré Sarre lors d’une visite à la colonie de Shiloh en 2011. « Nous ne devrions pas faire croire aux Arabes qu’un jour il n’y aura plus de Juifs ici. Juifs seront toujours là, et toute autre illusion apportera des obstacles sur le chemin de la paix. »
Plus de 250 enseignants israéliens ont envoyé une lettre à Sarre en février de cette année, annonçant leur refus de participer aux visites à Hébron proposées par le ministre du Patrimoine et destinées à renforcer les valeurs « juives et sionistes » chez les élèves.
« Nous savons que notre vocation d’éducateurs est de présenter aux élèves la vérité, du mieux que nous le pouvons. Une vérité partielle et partisane n’est pas de vérité du tout. Pour cette raison, nous ne sommes pas d’accord pour être des agents d’une telle politique, et nous ne nous mentirons pas à nous-mêmes, » dit la lettre des enseignants.
« Nous vous demandons de cesser d’utiliser le système d’éducation cyniquement pour des buts politiques extrémistes, et si nous sommes appelés à accompagner ces visites, nous refuserons. »
Un porte-parole du ministère israélien de l’éducation a refusé à plusieurs reprises de faire des commentaires sur ces visites.
Aujourd’hui, plus de 500 colons juifs israéliens vivent au cœur d’Hébron, placés sous la protection des soldats et de policiers israéliens. En raison de la présence des colons, la population palestinienne d’Hébron - qui est d’environ 200 000 personnes, la plus grande population urbaine en Cisjordanie - est soumise à des restrictions sévères sur la liberté de circulation, a perdu l’accès à ses principaux centres commerciaux et économiques, et est fréquemment victime de violences et d’arrestations.
« Le genre de visite d’Hébron [que les élèves vont] voir [sur les circuits ministériels] est une vue très étroite d’Hébron. Ce n’est pas un Hébron qui représente la ville. Ce n’est pas un Hébron qui représente les gens qui y vivent », a déclaré Yehuda Shaul, de l’organisation israélienne Breaking the Silence, un groupe de militaires vétérans israéliens qui ont servi dans les Territoires Palestiniens Occupés et qui cherchent à éduquer le public israélien sur les réalités de l’occupation.
Shaul dit que lorsque les visites du « patrimoine d’Hébron » ont été annoncées, Breaking the Silence a approché les écoles participantes et a offert d’envoyer les élèves sur leur propre tournée alternative d’Hébron. Lorsque la nature politique des visites du ministère a été révélée, les anciens soldats ont exhorté les écoles à boycotter complètement le programme.
« Hébron est le seul endroit où notre passé vient à la rencontre de notre présent repoussant », a déclaré Shaul. « Je ne peux pas imaginer un meilleur endroit que Hébron pour ouvrir une vraie discussion sur l’identité de notre pays et sur qui nous sommes et ce que nous devrions faire, sur quelles sont les valeurs qui devraient nous unir dans la société, mais ce n’est pas ce que [Sarre, le ministre de l’Éducation] vise à faire. »
« Ce n’est même plus de l’endoctrinement, c’est bien pire que cela : c’est d’utiliser des enfants comme soldats, c’est utiliser des enfants pour renforcer la présence des colons israéliens dans la ville. »
Selon une étude 2011 réalisée par l’institut de recherche allemand Friedrich-Ebert-Stiftung, la jeunesse israélienne affiche des vues de plus en plus nationalistes, et accorde plus d’importance au caractère exclusivement juif de l’État qu’au respect des valeurs démocratiques ou libérales.
Quelques 1600 jeunes, âgés de 15 à 18 et de 21 à 22 ans, ont été interrogés dans cette enquête et ils se déclarent très majoritairement de droite. Environ 70 pour cent des juifs israéliens adolescents entre 15 et 18 ans ont déclaré que, dans les cas où la sécurité nationale et la démocratie étaient en désaccord, la sécurité devait primer avant tout.
Les jeunes juifs religieux en particulier, a révélé l’étude, ont un « manque de confiance dans les institutions qui sont chargées de maintenir les principes démocratiques » et seraient prêts « à user de méthodes telles que la résistance civile (y compris la résistance civile violente), à préférer un leadership fort au-dessus de la primauté du droit, pour soutenir le déni des droits politiques des citoyens arabes d’Israël, et ils sous-estiment l’importance de la démocratie et de la paix comme objectifs nationaux ».
Dans un sondage réalisé en 2010 par l’institut de recherche israélien Mochot Maagar, 50 pour cent des adolescents israéliens juifs entre 15 et 18 ans pensaient que les citoyens palestiniens d’Israël ne devraient pas avoir les mêmes droits que leurs homologues juifs.
Quelque 56 pour cent des personnes interrogées disaient que les Palestiniens devraient être empêchés de candidater pour le parlement israélien, la Knesset, et 50 pour cent de ceux qui se sont présentés en tant que religieux ont déclaré qu’ils approuvaient le slogan « Mort aux Arabes ».
Selon Peled-Elhanan, ces attitudes peuvent être attribuées à un système éducatif qui place le nationalisme au-dessus des véritables études et d’un réel échange libre d’idées.
« Ils ne se soucient pas du droit international. Ils ne se soucient pas de décisions internationales. Ils ne se soucient pas de la justice internationale ou des droits de l’homme ou de toutes ces choses parce qu’ils apprennent à ne pas les respecter, » explique Peled-Elhanan.
Elle dit aussi que corriger le système éducatif israélien « de l’intérieur » était impossible, puisque la plupart des Israéliens n’ont conscience de rien.
« Ce sera très difficile de le démanteler, » a-t-elle déclaré à Al Jazeera. « Le grand changement ne peut venir que lorsque les États-Unis arrêteront de verser de l’argent et des armes ici et quand il y aura un réel et important boycott. Sinon, les autorités ne comprendront pas le message. »
*Jillian Kestler-D’Amours : journaliste canadienne basée à Jérusalem depuis mai 2010 et réalisatrice du documentaire « Sumoud » sur le combat d’un village bédouin du Negev.
29 juin 2012 - Al-Jazeera - Vous pouvez consulter cet article à :
http://www.aljazeera.com/indepth/fe...
Traduction : Info-Palestine.net - Naguib
URL du billet: http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=12366
http://www.aljazeera.com/indepth/fe...
Traduction : Info-Palestine.net - Naguib
URL du billet: http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=12366
vendredi 29 juin 2012
Aux sources du chaos mondial actuel : 2ème partie - Aux sources du sionisme volet XII - Petite généalogie du ghetto appelé "Israël"
Publié le 29 juin 2012 sur le site aline.dedieguez.pagesperso-orange.fr
par Aline de Diéguez
XII - Petite généalogie du ghetto appelé "Israël"
"La vérité doit être martelée avec constance, parce que le faux continue d'être prêché, non seulement par quelques-uns, mais par une foule de gens. Dans la presse et dans les dictionnaires, dans les écoles et dans les Universités, partout le faux est au pouvoir, parfaitement à l'aise et heureux de savoir qu'il a la majorité pour lui."
Johann Wolfgang von Goethe
"Toutes les contraintes du
monde ne feront pas qu'un esprit un peu propre accepte d'être
malhonnête."
Le Manifeste censuré d'Albert Camus
Le Manifeste censuré d'Albert Camus
*
Afin de comprendre comment s'est formé l' "esprit
sioniste" en pleine action aujourd'hui en Israël, il m'a semblé important,
à ce stade de l'analyse, de présenter une vue d'ensemble et aussi précise que
possible, de la manière dont se sont agglutinées une à une, et au fil du temps,
les briques du mur mental qui enferme Israël et ses habitants de l'intérieur et
de l'extérieur de leur enclos dans un ghetto politique et psychologique.
Le mur monstrueux érigé en terre palestinienne n'est que le
miroir du mur intérieur qui emprisonne ses concepteurs. Au mur qui serpente en
Cisjordanie sont venus s'ajouter des murs entre Israël et l'Egypte, des murs
entre Israël et la Jordanie et encore des murs entre Israël et le Liban. Le
ghetto est en passe d'être hermétiquement clos. Tous ces murs symbolisent une
mentalité à la fois arrogante et terrifiée. Pour les adorateurs du dieu Jahvé
et pour leurs héritiers politiques contemporains il y a toujours un
"nous" et un "eux", le ROW (The Rest of the World) pour
reprendre l'expression en usage aux Etats-Unis pour désigner les "non
élus".
Ainsi lorsqu'un Asher Ginsberg, plus connu sous le
pseudonyme de Ahad Ha'am, écrit dès 1891 dans son ouvrage La vérité sur Eretz
Israël: "Il nous faut traiter la population locale (c'est-à-dire eux) avec
amour et respect", on retrouve, sous une couche de paternalisme
secrètement condescendant et en dépit d'une générosité affichée, le mur
invisible derrière lequel se dissimule le sentiment de supériorité qui anime ce
sioniste au cœur sur la main, bourré de bonne volonté et de bonne conscience,
mais néanmoins fervent colon. Car ce qui unit tous les nationaliste sionistes,
qu'ils soient de la trempe extrémiste et messianique d'un Netanyahou et d'un
rabbin Ovadia Sofer ou de ceux qui appellent à un traitement plus humain de la
"population locale", c'est que l'immigration massive en Palestine et
l'éviction les habitants originels sont légitimes à leurs yeux.
Asher Ginsberg (Ahad Ha'am) (1856-1927)
C'est donc avec indignation que le "bon maître"
Ahad Ha'am dénonce les "mauvais maîtres" qui abusent de leur pouvoir
et maltraitent la "population locale": "Que font nos frères en
Eretz Israël? Exactement le contraire. Esclaves dans les pays de l'exil les
voilà qui jouissent d'une liberté sans entraves, d'une liberté anarchique
uniquement possible dans l'empire ottoman. Ce changement soudain a éveillé leur
inclination au despotisme comme chaque fois qu'un esclave devient roi. Ils traitent
les Arabes avec hostilité et cruauté, empiètent sur leur propriété, les
frappent sans raison, s'en vantent même, et il n'y a personne pour les
réfréner, pour mettre fin à ces pratiques éhontées et dangereuses." ( La
vérité sur Eretz Israël, p.29 )
L'indignation du "sioniste gentil" qui demande à
ses frères co-religionnaires et colons impitoyables de traiter la
"population locale" "conformément au droit et à la justice"
rappelle celle de deux dominicains du XVIe siècle, mais autrement plus rigoureux
dans leur dénonciation du colonialisme. Antonio de Montesinos a fustigé avec
violence les injustices de la colonisation des Espagnols chrétiens en Amérique
du sud. "Dites-moi, quel droit et quelle justice vous autorisent à
maintenir les Indiens dans une aussi affreuse servitude?" a osé clamer
dans un sermon le moine dominicain.
Antonio de Montesinos (env. 1475 - 27 juin 1540)
Quant à Bartholomé de las
Casas, il a non seulement dénoncé les pratiques des colons, mais contesté le
principe même de la colonisation. En attendant le "sioniste gentil" qui, à
l'instar du dominicain de la Renaissance espagnole, reconnaîtrait que
"toutes les guerres de conquête sont le fait de tyrans et qu'elles sont
par conséquent injustes" et "que les pays conquis sont de
l'usurpation", il est important de comprendre par quels mécanismes
psychiques et à partir de quel terreau politico-religieux le sentiment de leur
"bon droit" s'est incrusté dans les cervelles des colonisateurs de la
Palestine.
Bartholomé de las Casas
(1474-1566)
Car une question s'impose à l'esprit:
comment se fait-il qu'en dépit de la variété des origines ethniques et
géographiques dues à des conversions de masse qui, durant deux millénaires ont
considérablement enrichi la population des fidèles du dieu Jahvé, une
remarquable homogénéité du contenu des cervelles se traduise par la politique
ségrégationniste actuellement mise en pratique envers la population autochtone
et approuvée quasi unanimement tant à l'intérieur de l'Etat sioniste qu'au sein
de communautés éparpillées dans le monde entier et qui se qualifient de
"juives"?
La pulsion de séparer les Juifs des
non-Juifs ne se manifeste pas uniquement sous administration sioniste. Ainsi, il
existe en France un "Annuaire national de professionnels au service de
la communauté juive" [1] .Un Rassemblement des avocats juifs de
France, une Union des étudiants juifs de France, une Union des
patrons juifs de France, une Union des notaires, des médecins,
des parfumeurs, des podologues, des fleuristes, des
psychanalystes, des dentistes, des bouchers ou des
restaurateurs, tous estampillées "cashers" se sont enregistrés dans ce
portail. Pratiquement toutes les catégories professionnelles ont officiellement
pignon sur rue et sont inscrites dans le fameux "Annuaire
national". Par ailleurs, une soixantaine d'associations exclusivement
réservées aux Juifs sont officiellement reconnues. [2]
Une recherche affinée par département
permet aux internautes de ce portail dédié de consulter, par exemple, le
podologue ou le coiffeur "cashers" les plus proches de leur domicile. Il est
ainsi possible de savoir qu'il existe un dentiste juif dans tel département ou
un notaire juif dans tel autre. Le célèbre dîner du Conseil représentatif des
institutions juives de France (CRIF) voit défiler tout le Gotha politique,
culturel et économique de la République et le Grand Orient de France possède
depuis 2002, sous le nom de L'Etoile de la paix, sa loge
exclusivement judéo-sioniste. L'on a pu voir, de ses yeux voir, que tous
ces notables soutiennent comme un seul homme la politique de la patrie de leur
cœur, y compris ses pires exactions et même ses massacres à Gaza.
Cette réalité politique et économique n'est
pas le fruit d'un quelconque miracle ou d'une origine raciale unique
présupposant une sorte de "gène juif" qui pousserait les membres de cette
communauté à établir un régime d'apartheid en Palestine ou à se séparer des
autres nationaux lorsqu'ils préfèrent résider ailleurs. C'est pourtant cette
absurdité démographique que, revendiquant leur particularisme, les tenants d'une
"dispersion" à partir d'un seul groupe, lui-même déjà délocalisé dans
l'empire romain, essaient d'avaliser et de faire avaler au monde afin de
justifier leur revendication qu'Israël soit officiellement qualifié d'Etat
juif. "Il y a, aujourd'hui, une évidence précise d'un matériel génétique
commun à tous les juifs", n'hésite d'ailleurs pas à écrire un des sites
officiels de la communauté juive, Lamed.fr, dans un article
intitulé sans complexes: "Gènes juifs". [3]
Voir: - 11 - "Nous sommes un peuple...", 14 mars 2012
La réalité est beaucoup plus triviale et
plus simple. Une religion est également et avant tout une forme d'organisation
politique de la cité et du monde. C'est même la plus primitive et la plus
puissante de toutes les organisations politiques, puisqu'elle gère à la fois les
relations des hommes entre eux, sur la terre et leurs connexions avec l'au-delà.
La religion des fidèles du dieu Jahvé est probablement la plus politiquement
structurée, celle qui a manifesté depuis le début de son apparition le
prosélytisme le plus acharné et celle qui présente l'organigramme le plus
simple, le plus rustique et le plus efficace de toutes les mythologies que les
hommes se sont créées depuis qu'ils se cherchent des soutiens dans
l'au-delà.
Ces caractéristiques permettent de
comprendre que l'organisation politico-religieuse désignée de nos jours sous le
terme générique de judaïsme a connu de nombreux avatars: d'abord connue sous le
nom de jahvisme, puis de pharisaïsme, puis de talmudisme,
lequel devint le rabbinisme médiéval et donna naissance au rabbinisme
moderne. Ce mouvement a fini par se réincarner dans le judéo-sionisme
contemporain.
Le terme de général de judaïsme, utilisé
de nos jours, est une invention de l'historien juif Flavius Josèphe
détesté par ses co-religionnaires, parce que considéré comme un traître.
Longtemps rejeté par les Juifs eux-mêmes, l'emploi de ce terme est devenu
courant lorsqu'il s'est agi de distinguer la religion du dieu Jahvé du
christianisme devenu la religion dominante.
|
Ces métamorphoses successives lui ont permis de traverser les siècles alors que des mythologies tribales nées à la même époque et aux frontières moins bien dessinées, se sont progressivement fanées ou se sont diluées dans la mythologie nouvelle qui a pris inexorablement la succession de l'ancienne, dans une sorte d'évolution darwinienne des mythes que les hommes à la recherche du sens du monde et de celui de leur propre vie se sont construits depuis la nuit des temps.
Certes, il a toujours existé, à la marge, un mouvement spirituel incarné, du temps de Jésus par les Esséniens et aujourd'hui par le groupe des Naturei Karta, dont les membres sont très actifs dans les manifestations pro-palestiniennes, mais dont l'influence politique est faible, sinon nulle.
Tant qu'ils ont vécu dans l'enclos physique et psychique de la Judée, les fidèles du dieu Jahvé ont été dirigés d'une main de fer par une caste de prêtres et l'existence entière de la petite province a tourné autour du service du temple.
Cohen Gadol - Le grand prêtre du temple, gravure
Quand la Judée a cessé d'exister
politiquement, les communautés dispersées dans le monde entier n'ont nullement
été livrées à elles-même. Elles n'ont pas échappé à la tutelle théocratique sous
laquelle elles vivaient depuis quatre siècles et demi, et cela d'autant moins
que les dirigeants des temps de l'exil ont disposé de quatre atouts
particulièrement efficaces de nature à créer un terrain psychologique commun et
uniforme à leurs ouailles, à savoir :
I - Un récit exclusivement
réservé à un groupe restreint.
II - La pérennisation d'un gouvernement
central puissant.
III - Un texte faisant office de
constitution, la Thora, accompagnée d'une gigantesque compilation - les
Talmud - composés de commentaires, d'exégèses et de directives diverses
qui assuraient le pouvoir de "théologiens spécialistes" dans chacun des
petits groupes décentralisés. Mais tous les notables et dirigeants du fait
religieux - les rabbins - demeuraient en relations étroites avec le gouvernement
théocratique central et en recevaient les directives.
IV - Un ennemi détesté. Cette condition
politique est capitale. Elle fut un élément déterminant dans la délimitation
définitive des frontières de la religion du dieu Jahvé. En effet, les
professionnels du culte de ce dieu ont ainsi pu tracer fermement le périmètre et
le contenu de leur doctrine. Une grande partie des Talmud est consacrée à
des quolibets contre cet ennemi haï et repoussé. Le christianisme né à la fois
au sein du judaïsme et contre lui, construisait, lui aussi, à la même époque,
son espace vital et son périmètre théologique. Comme les premières et les plus
importantes conversions à la nouvelle religion se sont opérées parmi les fidèles
du dieu Jahvé, une violente rivalité a opposé les tenants des deux doctrines.
Leurs textes respectifs, notamment celui, plus prolixe et mieux structuré à
l'époque, des défenseurs de l'ancienne mythologie, en portent les stigmates et
chacun s'est défini par rapport au rival haï.
ANALYSE DE CHACUN DE CES
ATOUTS
Ière partie - Une religion destinée à une seule tribu
IIè partie - Un gouvernement central puissant et vagabond
A - La construction des fondations de ce grouvernement
théocratique: le rôle d'Esdras
B - Les réformes d'Esdras: la Grande Assemblée et la
consolidation du pouvoir central
C - De la Grande Assemblée au Sanhédrin: le gouvernement
central bétonne ses prérogatives
D - Le gouvernement central quitte Jérusalem
E - Le centre du pouvoir en mouvement
F - Le pouvoir central du Sanhédrin face à l'empire romain
décadent
G - Le Sanhédrin à Babylone : apogée du gouvernement central
H - Nouveau déménagement du Sanhédrin: direction l'Espagne
puis la Pologne
IIIè partie - Les textes fondateurs du gouvernement central
A - La "loi écrite", la "loi orale"
B - La "Thora orale" et le principe d'autorité
IVè partie - De l'utilité d'avoir un ennemi
A - Le judaïsme face au christianisme naissant: le Talmud de
Jérusalem
B - Le judaïsme et le christianisme avant la conversion de
Constantin
C - La conversion de Constantin et la consolidation
politique de l'identité juive face au christianisme triomphant
D - Le Talmud de Babylone et la codification de
l'exceptionnalisme juif
Ière Partie - Une religion destinée à une seule tribu
Je ne reviens pas sur le premier point. Dans l'ensemble des
chapitres précédents, j'ai analysé dans quelles conditions politiques la notion
de "peuple élu" par une divinité particulière s'était imposée à un
groupe de tribus de nomades apparentés, en voie de sédentarisation qui, ayant
décidé de s'établir, ont jeté leur dévolu un territoire déjà habité et mis en
valeur depuis des siècles par d'autres peuples, et comment ces guerriers se
sont auto-justifiés d'expulser manu militari les habitants autochtones et de
s'installer commodément sur le territoire conquis par l'invention d'une épopée
mythique au cours de laquelle ils auraient reçu un cadeau du ciel. C'est à une
répétition de la même situation et du même comportement que nous avons assisté
à partir du début du XXe siècle.
Voir plus précisément
- 10 - La
chimère du "Grand Israël" , 18 janvier 2012
A - La construction des fondations de ce grouvernement théocratique:
le rôle d'Esdras
Contrairement à ce que laisse supposer la notion de
"diaspora", plutôt que d'une dispersion - notion qui sous-entend un
émiettement anarchique - on devrait évoquer des délocalisations volontaires de
groupes qui sont toujours demeurés en relations les uns avec les autres, mais
qui, surtout, sont restés étroitement reliés à un centre du pouvoir. En effet,
un gouvernement central et une diffusion hiérarchique des directives à partir
de ce centre vers les périphéries a toujours parfaitement fonctionné sur le
terrain, donnant naissance à une situation originale et unique de théocratie
délocalisée.
Le gouvernement théocratique a été fermement mis en place
durant la période qui s'étend entre le maigre retour du dernier groupe des
exilés de Babylone conduits par Esdras et la révolte des Maccabées. La décision
de Nabuchodonosor d'exiler l'élite du royaume de Juda est intervenue en -587.
L'édit de Cyrus qui autorise le retour dans leur patrie de tous les exilés
politiques - donc y compris les Judéens - a été promulgué en - 538. Or, Néhémie
n'est revenu une première fois en Judée qu'en -445, soit près d'un siècle plus
tard. Quant à Esdras, la date de son retour oscille, selon les historiens,
entre -458 et -393, soit après une période comprise entre cent trente et cent
quatre-vingt dix ans.
Voir : - 4 - Comment le cerveau d'un peuple est devenu un
bunker , 3 novembre 2010
Ces dates sont importantes. Elles situent les réformes dans
l'histoire réelle et leur retirent l'aura "sacrée" intemporelle et
l'espèce de vapeur mystique qui empêche de mesurer leur impact sur la vie de la
cité et expédient les évènements dans la "moyenne région de l'air"
dont parle Descartes.
Grâce à ces jalons historiques on comprend que durant près
de deux siècles, la Judée s'est trouvée intégrée dans l'histoire commune à tous
les peuples de la terre. Des mouvements spontanés d'entrée et de sortie de
populations venus occuper les places laissées vides par les exilés s'y
produisirent le plus naturellement du monde. Les mariages inter-ethniques ne se
comptaient plus, les nouveau-venus adoptaient les coutumes et les dieux de la
société-hôte et s'intégraient dans leur nouvelle communauté.
Esdras montre le livre de la loi, gravure de Doré,
Bible
IIème Partie - Un gouvernement central vagabond
Tout a été bouleversé lors de l'irruption des deux exilés,
Néhémie, le serviteur de l'empereur perse Artaxerxès, et Esdras, qualifié
tantôt de scribe, tantôt de prêtre, tantôt de docteur. Le rôle du premier est
plutôt celui d'un administrateur chargé de veiller à la reconstruction du
temple et des remparts de Jérusalem. C'était également une sorte de muttawa
qui, à l'instar de la police affectée en Arabie Saoudite à "la promotion
de la vertu et à la prévention du vice" se chargeait de faire respecter
une discipline religieuse rigoureuse. Quant à Esdras, en idéologue fanatique,
il a si profondément marqué la politique et la religion de la petite province
que la vie sociale de la population en a été complètement chamboulée à l'époque
et que les répliques de ce violent tremblement de terre politique et social,
intervenu au IVe siècle avant notre ère, continuent de se faire sentir de nos
jours.
En effet, Esdras est le théoricien politico-religieux qui a
réussi l'exploit de faire opérer une brutale marche arrière à l'histoire de
cette région. Par une involution du sens de la politique de la cité en
direction d'un supposé âge d'or antique, durant lequel la population était
censée avoir vécu dans des conditions sociales et religieuses harmonieuses sous
le regard bienveillant de sa divinité particulière, le scribe Esdras, sorte de
nouveau Moïse, se sentait appelé à redonner à la Judée les lois et les
institutions qui allaient lui permettre de rejoindre cet idéal.
Mettant ses pas dans les pas d'Esdras, c'est à la même
négation de deux mille ans d'histoire de la région que le sionisme messianique
se livre aujourd'hui en Palestine. Avec Esdras, les Judéens sont entrés dans
l'histoire à reculons et depuis lors, la marche en crabe est devenue leur forme
naturelle d'existence politique.
Pour ce faire, il a fallu à Esdras commencer par anéantir
tous les changements démographiques, politiques ou sociaux intervenues durant
près de deux siècles et rétablir un code et une discipline religieux aussi
stricts que pointilleux censés avoir existé avant la période de l'exil. Il s'y
est employé avec un zèle et un fanatisme exemplaires. Les sionistes ont
parfaitement retenu la leçon, comme le montrent les massacres et la purification
ethnique à grande échelle auxquels ils se sont livrés durant les premières
décennies du XXe siècle.
En effet, ce docteur de la loi était porteur des quatre
premiers livres du Pentateuque dont aucun Judéen n'avait entendu parler
jusqu'alors. Ajoutés au texte plus ancien du Deutéronome, l'ensemble forme la
Thora, également appelée "loi écrite".
B - Les réformes d'Esdras: la Grande Assemblée et la consolidation
du pouvoir central
Pour comprendre comment a pu fonctionner durant deux
millénaires la théocratie délocalisée qui a fini par donner naissance au
sionisme, il faut revenir un instant à l'œuvre législative fondatrice du prêtre
Esdras et à la recomposition politique, économique et religieuse de la société
judéenne dont il fut la cheville ouvrière.
En effet, les auteurs des quatre premiers livres de la Thora
rédigés durant l'exil à Babylone ne sont pas nommément identifiés. Les
différents styles des textes révèlent qu'il y eut plusieurs rédacteurs et
qu'Esdras fut probablement l'un d'eux. Mais il est historiquement avéré que
c'est lui qui a transporté l'ensemble de Babylonie en Judée et qu'il a lu
solennellement au peuple rassemblé les quatre livres nouveaux, ainsi que le
plus ancien - le Deutéronome - profondément remanié et devenu le cinquième.
C'est à partir de ce moment que le contenu théologique des
textes bibliques s'est métamorphosé en politique réelle des Hébreux et que le
mythe est devenu histoire. C'est comme si nous devions croire dur comme fer
qu'un don Quichotte en chair et en os serait sorti des pages imprimées de
l'ouvrage de Cervantès pour galoper réellement à travers le monde sur un vrai
canasson.
Voir: 4 - Comment le cerveau d'un peuple est devenu un bunker , 3 novembre
2010
Esdras est l'un de ces hommes-charnières auxquels l'histoire
officielle accorde une place relativement modeste alors que le rôle politique
qu'ils ont joué de leur temps fut déterminant et que leur influence sur leurs
successeurs demeure pérenne. Au début du XXe siècle, un homme politique
américain dont tout le monde a oublié l'existence et même le nom - le Colonel
House - fut, aux Etats-unis, l'un de ces grands acteurs qui tirèrent
discrètement, mais efficacement, les ficelles du pouvoir à partir des coulisses
et à une période capitale. On lui doit, notamment, un rôle décisif dans la
création de la FED. Nous continuons de payer les conséquences de son action et
le sionisme triomphant, dont il fut dès l'origine un ardent soutien, lui doit
également beaucoup.
Afin de régénérer une religion qu'il jugeait moribonde lors
de son retour de Babylone, Esdras s'attaqua d'emblée au chantier de la réforme
législative et décida de "rétablir" dans des fonctions législatives
et judiciaires une Assemblée des Anciens qui aurait été fondée par un Moïse
légendaire un millénaire et demi auparavant ( Nombres 11,16). D'autres
"chercheurs" font remonter l'origine de cette assemblée à une sorte
de tribunal créé par un roi Josaphat, que le texte biblique désigne comme un
des successeurs du pseudo royaume de Salomon et dont on trouve la trace dans 2
Chroniques 19,8.
Or, ces deux livres font précisément partie de l'ensemble
rédigé durant l'exil, si bien qu'il s'agit de la mise en pratique de projets
conçus à Babylone, mais qu'il était judicieux et plus efficace d'attribuer à
des ancêtres mythiques.
C'est bien pourquoi selon l'article The Great Assembly de la
Jewish Encyclopaedia de 1906 - The great Synagogue ou Knesset Haguedola en
hébreu - Esdras fut le vrai maître d'œuvre de cette institution et qu'il assura
lui-même la direction de l'assemblée de "sages" qui venait de voir le
jour et appelée depuis lors la Grande Assemblée. Il est admis qu'elle comptait
parmi ses membres trois prophètes classés parmi les prophètes post-exiliques
mineurs Haggai, Zacharie et Malachie. Bien qu'aucun document vraiment fiable ne
puisse le confirmer, le nombre de cent vingt est aujourd'hui admis par la quasi-totalité
des instances juives contemporaines alors que la Jewish Encyclopaedia de 1906
hésite entre quatre-vingts ou quatre-vingt-cinq.
L'Etat sioniste contemporain a tranché ce point de théologie
politique: il a repris le nom de Knesset et son assemble législative compte,
elle aussi, cent vingt membres. Cette nouvelle "Grande Assemblée du
sionisme" place donc tacitement le nouvel Etat dans une continuité
biblique et suggère implicitement qu'il s'agirait, après deux mille ans
d'errance - un frôlement d'ailes de papillon au regard de l'éternité - d'un
simple retour d'exil, semblable au retour des exilés de Babylone. Des Juifs se
sont absentés de leur domicile, des Juifs sont revenus chez eux, point final.
Esdras n'était pas un prophète, mais un grand esprit
politique. En tant que figurant parmi les probables compilateurs de la Thora,
il en était donc un interprète particulièrement autorisé. Les autres membres de
cette Grande Assemblée n'étaient ni élus, ni permanents. Il suffisait de
prouver qu'on était meilleur "savant en loi religieuse" que tel
membre siégeant pour prendre sa place. C'était un système de roulement
astucieux qui créait à la fois une émulation théologique et un renouvellement
qui empêchait ses membres les plus anciens de s'incruster à vie dans
l'institution. La mémoire, l'audace, l'assurance et l'agilité interprétative de
la Thora prouvaient que les prétendants étaient les dignes successeurs d'une
lignée de "sages".
C'est ainsi que le commentateur de la Thora est devenu au
fil des siècles le personnage politique capital car, comme l'écrit Flavius
Josèphe à propos des Pharisiens, les successeurs des membres de cette
assemblée, "ils l'emportaient sur tous les autres par leur piété et par
une interprétation plus exacte de la Loi". "Séparés de l'impureté et
de la souillure" de la pratique commune, ils se glorifiaient de
"faire une haie à la Thora".
L'institution a ensuite évolué en fonction des occupations
politiques successives de la province, mais le principe mis en place du temps
d'Esdras a toujours été fermement maintenu: le commentateur, le
"docteur", le "sage", le "rabbin" ont continué
d'occuper le sommet de la hiérarchie politico-religieuse.
C - De la Grande Assemblée au Sanhédrin: le gouvernement central
bétonne ses prérogatives
Mais avant de revenir sur le rôle théologico-législatif joué
par cette Grande Assemblée ou Grande Synagogue, j'en viens à l'institution qui
lui a succédé: le Sanhédrin.
Néhémie arrive devant les portes en ruines de Jérusalem, gravure de
Doré, Bible
En effet, lorsque la petite province de Palestine est passée
de la domination perse à la domination grecque des successeurs d'Alexandre le
Grand, le rôle de la Grande Assemblée qui avait commencé de détacher le
judaïsme du strict culte du temple et des sacrifices d'animaux, pour le
remplacer par l'étude et les commentaires de la Thora s'était progressivement
affaibli, mais elle avait permis, comme le rappelait l'historien juif Josèphe,
la montée en puissance du groupe rigoureux des Pharisiens qui jouera un rôle
déterminant dans l'évolution politico-théologique du judaïsme. Ils se
prétendaient les détenteurs privilégiés d'une "loi orale" dont Esdras
aurait révélé l'existence et qui, au nom d'une "tradition" dont ils
étaient les seuls maîtres, leur permettait d'aller au-delà du contenu du texte
écrit. Ce que contestait un autre groupe, appelé Sadducéens. Attachés au
service du temple, ses membres ne reconnaissaient que la "loi écrite",
c'est-à-dire la Thora. Mais ce groupe n'a pas connu une postérité politique
agissante et a fini par être éliminé. En politique, les négociateurs, les
modérés, les "centristes" sont toujours supplantés par les
"durs".
L'institution du Sanhédrin et sa dénomination datent
évidemment de l'époque de la domination grecque, puis romaine, puisqu'il ne
s'agit pas d'un mot hébreu, mais grec - sun-hedra, être assis ensemble. Mais
hedra signifie également assemblée en grec. On ne trouve une première mention historique
indiscutable de l'action d'un Sanhédrin que tardivement, sous le règne du roi
Antiochus le Grand (-223 -187). (Flavius Josèphe, Antiquités judaïques, XIII,
iii,3).
Les groupes de Judéens qui étaient progressivement revenus
de Babylone avaient imposé l'araméen comme langue vernaculaire en Judée.
Cependant, la langue hébraïque n'avait pas disparu totalement, même si elle
était désormais réservée aux prières et aux activités rituelles. L'araméen
demeura la langue ordinaire du peuple dans son ensemble jusqu'à la fin
politique de la Judée en l'an 70, mais après la conquête d'Alexandre, les
élites s'y exprimaient en grec, y compris lorsque la province est passée sous
domination romaine. C'est ainsi qu'au premier siècle de notre ère, les
Evangiles chrétiens furent rédigés en grec.
Croquis d'un Sanhédrin
" A la même époque encore, j'ai vu des Juifs qui
avaient installé chez eux des femmes asdodiennes, ammonites, moabites. La
moitié de leurs fils parlaient l'asdodien [l'araméen] mais ne savaient pas
parler la langue des Juifs: c'était comme une langue étrangère pour eux. Je
leur ai adressé des reproches et les ai menacés de malédictions. J'ai frappé
quelques-uns de ces hommes, leur ai arraché des cheveux et leur ai fait prêter
serment au nom de Dieu en disant: "Vous ne donnerez pas vos filles en
mariage à leurs fils et vous ne prendrez leurs filles comme épouses ni pour vos
fils ni pour vous. " Nehémie,13, 23-25
L'institution du Sanhédrin et de son corollaire, le
rabbinat, furent le centre du pouvoir et de la cohésion des communautés juives
dans le monde entier. Chaque région hellénisée possédait son petit Sanhédrin
revenu à soixante et onze membres, mais celui de Jérusalem était évidemment le
plus important. Il demeure le plus célèbre, parmi les chrétiens, puisqu'il est
à l'origine de la crucifixion du créateur de la nouvelle religion après sa
condamnation à mort pour blasphème par le tribunal de cette assemblée. En
effet, le Sanhédrin exerçait pleinement la justice, possédait sa propre police
et pouvait procéder à des arrestations. C'est ainsi que Jésus fut arrêté par la
police du Sanhédrin. Le Sanhédrin pouvait également condamner à mort, mais les
Romains avaient restreint ses droits et lui avaient retiré celui d'exécuter les
sentences, ce pouvoir étant réservé au maître romain. C'est pourquoi Jésus a
été crucifié - une punition romaine - et non lapidé conformément à la loi
juive.
Présidée par un "prince" - le nassi - cette
assemblée aux attributions très larges jouait donc le rôle d'un véritable
gouvernement à la fois religieux et civil. Outre son pouvoir judiciaire, elle
légiférait sur les mariages dans les familles sacerdotales, mais elle
s'occupait également du cadastre de Jérusalem et des constructions dans les
faubourgs, elle établissait le calendrier et les dates des fêtes rituelles et
surtout elle déchiffrait, interprétait et établissait une codification
définitive de la loi juive.
D - Le gouvernement central quitte Jérusalem
Avant même la chute de Jérusalem en l'an 70, le Sanhédrin
s'était subrepticement délocalisé à Yavneh (ou Jammia selon la terminologie
romaine).
Pour expliquer comment les principaux notables pharisiens
avaient réussi à quitter la ville, alors en proie à la fois à un siège de
l'armée romaine et à une atroce guerre civile menée par un autre groupe de
Judéens, les Zélotes encore plus rigoureux et plus fanatiques que les
Pharisiens, l'histoire juive raconte l'anecdote suivante : le chef des
Pharisiens de l'époque, Rabbi Yo'Hanan ben Zakaï, aurait inventé le stratagème
de se faire enfermer dans un cercueil qui aurait été déposé aux pieds de
Vespasien, alors Général en chef des légions romaines, car les Zélotes qui
tenaient la ville menaçaient de crucifier quiconque tenterait de sortir. Ils
n'autorisaient que le passage des cercueils.
Il faut imaginer la scène d'un rabbin juif jaillissant de
son cercueil et saluant le général romain du titre d'empereur, alors que la
nouvelle de sa désignation à l'imperium n'avait été connue que plus
tardivement. Vespasien aurait été si impressionné par cette flatterie, qu'en
barbare superstitieux il l'aurait interprétée comme la marque d'un esprit
exceptionnel, capable de prédire l'avenir. A titre de récompense, le Général
romain aurait, durant le siège de Jérusalem, accordé des sauf-conduits à tous
membres du Sanhédrin de Jérusalem, les autorisant à s'installer dans la petite
ville Yavneh. La ruse d'un rabbin aurait sauvé le judaïsme en sauvant les
ultimes détenteurs de la "loi orale". Je reviendrai sur cette notion.
La vraisemblance de la scène laisse pour le moins rêveur, on
brûle d'avoir des détails sur les péripéties qui auraient permis à ce cerceuil
et à son contenu de seulement arriver jusqu'à la tente du futur empereur!
Hélas, on n'en trace nulle part ailleurs que dans la légende dorée du judaïsme.
Si elle avait existé, une péripétie aussi piquante n'aurait pas échappé à la
plume d'un Suétone ou d'un Tacite qui a décrit un Vespasien réticent à accepter
l'empire. Le chroniqueur juif Flavius Josèphe, pourtant contemporain des
évènements - et lui-même survivant du siège - est muet sur ce sujet.
Ce genre d'anecdote illustre le besoin de tout groupe humain
de se créer un passé mythologique héroïque afin de nourrir l'imaginaire du
peuple. Cet épisode cocasse est à ajouter aux évènements mythologiques
rapportés dans les livres du Pentateuque. L'histoire juive est coutumière de ce
genre de petite vantardise destinée à flatter l'ego national et à illustrer
l'ingéniosité des dirigeants. Elle s'était déjà manifestée à propos des grâces
dont les Judéens auraient été bénéficiaires de la part de Cyrus, d'Artaxerxès
ou d'Alexandre le Grand.
Voir
- 4 - Comment le cerveau d'un peuple est devenu un bunker ,
3 novembre 2010
- 5 - La théocratie ethnique dans le chaudron de l'histoire
, 3 janvier 2011
Toujours est-il, que la délocalisation à Yavneh a bien eu
lieu et que les membres du Sanhédrin ont réussi à s'exfiltrer de la ville
assiégée. Cette première émigration du siège du gouvernement théocratique
marque la fin d'une époque, mais nullement celle du règne des Pharisiens sur la
mentalité des Judéens.
Il est intéressant de noter que les pères fondateurs de la
Constitution des Etats-Unis ont créé le Sénat américain sur le modèle
architectural du Sanhédrin biblique - et notamment la présentation en
demi-cercle des sièges des sénateurs - mais ils ont pris soin de séparer les
immenses pouvoirs du Sanhédrin de Judée et de les répartir entre deux
institutions, un Sénat et une Cour suprême. Or, c'est précisément le
regroupement des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire entre les seules
mains du Sanhédrin juif qui assurera l'immense pouvoir que cet organisme
exercera sur les communautés dispersées.
E - Le centre du pouvoir en mouvement
Après la destruction de Jérusalem et le transfert de son
Sanhédrin à Yavneh, les Romains acceptèrent que le Rabbin Nassi du Sanhédrin
(le Prince de Judée) en fût le chef local. Rome reconnaissait à la fois son
autorité religieuse et son pouvoir judiciaire. Mais en réalité, le pouvoir du
Sanhédrin de Jérusalem n'était pas seulement local: il agissait en tant que
représentant de tous les Juifs de l'empire, si bien qu'une sorte de
gouvernement central, assisté d'une assemblée a continué de fonctionner en
Palestine.
Un petit village agricole sis au centre de la Judée, devint,
de fait, le nouveau centre politique et spirituel du judaïsme mondial sans qu'il
y eût aucune déclaration officielle de l'ensemble des "sages" et des
"docteurs de la Loi" - comme ils se désignaient eux-mêmes. A partir
de ce nouveau centre, le Nassi - le rabbin au cercueil évoqué ci-dessus -
pouvait envoyer ses instructions à toutes les communautés de la région. Les
groupes de la diaspora situés hors de Palestine se tournaient, eux aussi, vers
Yavneh pour tout ce qui concernait l'interprétation de la loi religieuse et
civile confondues, ainsi que sur les modes de leur application dans la vie
quotidienne. Des messagers sillonnaient la province quasiment en permanence
dans les deux sens.
Quant à l'importante et prospère communauté qui se plaisait
en Perse depuis cinq siècles et qui n'avait nullement l'intention d'en bouger,
elle était informée des dates des principales fêtes, et notamment du pèlerinage
de la Pâque, grâce à un système astucieux de signaux de fumée à partir d'une
chaîne de feux allumés sur les hauteurs.
Après un siècle de séjour à Yahneh, le Sanhédrin, ainsi que
les "académies" - des Yeshiva - qui avaient été créées afin de
rédiger des commentaires de la Thora, quittèrent le petit village et, en l'an
140, après la révolte de Bar-Kochva (132-135), s'installèrent dans un bourg
plus calme, à Usha.
En l'an 169, le Sanhédrin et sa suite déménagèrent à
Shefaram (Shafa-Amar), actuellement un village druze de la haute Galilée. La
situation géographique de ce gros bourg agricole, entre deux collines, mais
surtout traversé par une voie romaine stratégique, en faisait une localisation
politique nettement plus favorable que Javneh ou Usha, puisque cette voie
assurait une communication aisée vers la vallée du Jourdain, d'un côté, et la
baie de Haïfa, de l'autre.
On ne connaît pas la raison qui poussa le Sanhédrin et les
"académies" à déménager à Beit-Shearim (Besara). Peut-être parce que
ce bourg était un important site de stockage des céréales. L'historien juif de
la grande révolte de 68-70 contre les Romains, Flavius Josèphe, y avait son
quartier général au début des hostilités. Le Sanhédrin demeura trente ans
durant - entre 180 et 210 - dans ce gros bourg de Galilée.
Puis, toujours saisi par la bougeotte et à la recherche d'un
point de chute idéal qui lui permettait de diffuser commodément ses directives,
le Sanhédrin et les "docteurs de la loi" s'installèrent à Sepphoris,
un autre gros bourg dont Hérode le Grand avait fait la capitale de la basse
Galilée, mais qui, après la seconde grande révolte juive contre l'empire
romain, celle de Bar-Kochva, déjà rappelée, avait été en partie rasée, puis
reconstruite. Les Romains la nommèrent Deocaesarea (ville de Zeus et de
Caesar).
Sepphoris - Route romaine
L'important, une fois de plus, était de se trouver sur une
excellente voie de communication. En effet, en dépit de cet
"accident" historique, cette cité était idéalement située et les
grands bâtisseurs de routes en firent un nœud routier important. Instruits par
les révoltes précédentes, les Romains, avaient à cœur de pouvoir se déplacer
très rapidement à travers la province. Sepphoris était donc reliée au port
d'Acre en passant par Usha, mais elle était également reliée à Meggido, un site
stratégique qui, à travers les collines du Carmel, permettait de retrouver
l'ancienne Via Maris qui reliait l'Assyrie à l'Egypte. C'est sur ce site que le
roi Josias s'était cru capable d'arrêter l'armée du pharaon égyptien Nechao II
et qu'il y fut blessé à mort durant la bataille.
Voir :- 2 - L'invention du "peuple élu" et de la "Terre Promise", 30 mars 2010
Une route romaine traversait également le plateau du Golan
en direction de l'importante cité de Tibériade sur les bords de la Mer Morte.
C'est finalement dans cette riante capitale de la Galilée que les docteurs de
la loi ont achevé leur course à travers la province de Palestine. Tibériade fut
un centre religieux, administratif et culturel particulièrement animé et agité
de la judéité en raison des aigres querelles qui agitaient les rabbins.
Néanmoins le centre continua de fonctionner durant environ cinq siècles, et ce
jusqu'à la conquête de toute la région par les Perses et les Arabes. Les plus
importants textes post-bibliques - la Michna et le Talmud dit "de
Jérusalem" - furent rédigés dans ce cadre paradisiaque.
Tibériade, ruines de l'ancienne ville
Ce qu'il y a de frappant dans tous ces déménagements du
centre du pouvoir politico-religieux, c'est de voir à quel point ils sont
conditionnés par la commodité des voies de circulation et à quel point les
têtes politiques du Sanhédrin qui ont sillonné la Galilée ont eu d'emblée le
sens de la "com". Ils ont su utiliser le principal outil de
communication de l'époque, à savoir les gigantesques aménagements routiers que
construisait partout l'empire romain afin que les légions pussent arriver
rapidement sur les lieux en cas de révolte.
F - Le pouvoir central du Sanhédrin face à l'empire romain
décadent
Au début du IVe siècle, toute l'organisation
politico-religieuse patiemment construite par le Sanhédrin à l'intérieur de la
Palestine a subi un véritable bouleversement. C'était l'époque du déclin de
l'empire romain durant laquelle les Césars étaient nommés par les légions et où
les candidats pullulaient.
L'an 138 avait pourtant marqué une date importante dans
l'histoire des relations des Juifs avec Rome: les deux Talmud(s) mentionnent la
conversion d'un Antonin au judaïsme, sa circoncision, ainsi que des relations
fraternelles avec le rabbin Yéhoudah ha-Nassi. Cette information est absente de
l'histoire romaine. Son origine trouve probablement sa source dans une
interprétation exagérée du fait que l'empereur Antonin le Pieux (86-161) aurait
accordé au judaïsme pharisien le statut de religion reconnue et légitime, en
signe de reconnaissance pour les dons d'un rabbin thaumaturge qui aurait
miraculeusement guéri sa fille. Les résidents juifs étaient alors devenus une
partie officielle de la population de l'empire romain.
Voir : 11 - Nous sommes un peuple , 14 mars 2012
Mais, comme cela avait été le cas en Egypte, notamment sous
les Ptolémée, le luxe inouï et ostentatoire de quelques-uns, ainsi que les
privilèges dont ils avaient été comblés par les empereurs du premier siècle,
exaspéraient le peuple romain et avaient provoqué une animosité populaire qui
se manifestait parfois violemment contre tous les Juifs. Et pourtant, l'immense
majorité d'entre eux vivait pauvrement dans un quartier sale et retiré de Rome
- le Transtévère - une sorte de ghetto avant la lettre et se livraient surtout
au commerce et à de petits métiers plutôt misérables. Mais une colère populaire
ne fait jamais dans la dentelle, surtout lorsqu'elle se double d'un conflit
religieux.
Or Rome faisait pourtant preuve, à l'époque, d'une tolérance
remarquable envers tous les cultes et toutes les superstitions. L'écrivain
romain Varron rapporte, en effet, que l'expansion territoriale de l'Empire
aidant, la Ville avait fini par compter environ trente mille dieux. Les cent cinquante-sept
jours fériés dans l'année étaient à peine suffisants pour les honorer tous. Le
dieu Jahvé était l'un d'entre eux. "La terre est pleine de dieux"
avertissait Cicéron (-106 à -43) dans son De natura deorum. L'historien grec
Polybe (vers -208 à environ -126) s'en amusait déjà. "Les Romains sont
plus religieux que les dieux eux-mêmes", écrivait-il.
Dans l'empire romain, les Grecs, les peuples asiatiques, les
Germains, les Gaulois, tous pratiquaient leurs rites propres, mais à la
différence des Juifs, ils acceptaient de se conformer aux us et coutumes de la
cité et de s'incliner devant les statues de Mars et de Jupiter. Tous pouvaient
pratiquer leurs religions et leurs superstitions à condition de ne pas nuire à la
religion officielle. Or, la grandeur de Rome et l'observance rigoureuse des
rites de la religion nationale ne faisaient qu'un. Les décisions des magistrats
n'étaient valables que si certains rites étaient pratiqués, les augures
guidaient les mouvements des légions et les sacrifices aux dieux dont il
fallait se concilier les faveurs étaient permanents.
En face de la religion d'Etat officielle, le ritualisme,
l'intolérance et le mépris affiché des adorateurs de Jahvé pour les autres
croyances, notamment pour les dieux romains, excluait qu'ils acceptassent toute
concession et même tout désir de comprendre la société dans laquelle ils
s'étaient installés et dont ils tiraient leur subsistance. De plus, un
prosélytisme ardent et particulièrement efficace inquiétait les Romains car il
mettait en péril les fondements mêmes de l'empire qui reposaient sur une
observance stricte des pratiques religieuses nationales.
"Pourquoi, dans toutes ces contrées, dans toutes ces
villes, les Juifs furent-ils haïs ? Parce que jamais ils n'entrèrent dans les
cités comme citoyens, mais comme privilégiés. Ils voulaient avant tout, quoique
ayant abandonné la Palestine, rester Juifs, et leur patrie était toujours
Jérusalem, c'est-à-dire la seule ville où l'on pouvait adorer Dieu et sacrifier
à son temple. Ils formaient partout des sortes de républiques, reliées à la
Judée et à Jérusalem, et de partout ils envoyaient de l'argent, payant au
grand-prêtre un impôt spécial, le didrachme, pour l'entretien du temple." Bernard
Lazare, L'antisémitisme
G - Le Sanhédrin à Babylone : apogée du gouvernement central
Au IVe siècle, des heurts de Juifs avec une garnison romaine
éclatèrent dans la province de Palestine et entraînèrent la destruction de
Tibériade, de Séphoris et de Lydda, les anciennes localités de résidence du
Sanhédrin. Du coup, le Sanhédrin s'empressa de déménager une fois de plus et se
replia en lieu sûr, en Babylonie.
Peu d'exilés étaient finalement retournés en Palestine après
l'édit de Cyrus. Ils s'accommodaient parfaitement de la vie facile et luxueuse
de Babylone et avaient fini par constituer une riche colonie de fonctionnaires
à la cour - comme ce fut le cas de Néhémie. Ils étaient également banquiers,
artisans prospères, riches marchands exportateurs de grains, de vins, de laines
ou importateurs de fer, de soie, de pierres précieuses, mais aussi, plus
modestement agriculteurs, éleveurs, tenanciers ou colporteurs. Ce qui
n'empêchait pas tout ce monde parfaitement heureux de vivre paisiblement au
bord de l'Euphrate, de gémir sur la douleur d'un exil volontaire que personne
n'avait envie de faire cesser. " Sur les rives des fleuves de Babylone,
nous nous sommes assis, et là, nous avons pleuré au souvenir de Sion. "
(Psaume CXXXVI. 1)
Ce type de "société de l'exil" devint un modèle
pour les communautés qui s'installèrent plus tard dans les mondes chrétien et
musulman.
Le Sanhédrin s'installa donc à Soura, une vieille cité
agricole située dans la partie sud du vieux Babylone et sur la rive ouest de
l'Euphrate. La théocratie y établit ses quartiers pour cinq siècles et les
fameuses "académies" furent crées à Pumbédita et à Néhardéa.
H - Nouveau déménagement du Sanhédrin: direction l'Espagne
puis la Pologne
De nouveau, après trois siècles d'une quiétude entrecoupée
de bouffées de violences suscitées par des Mages persans qui détestaient à la
fois les juifs et les chrétiens, les académies furent fermées, la célébration
du sabbath fut interdite et les adorateurs de Jahvé furent victimes de
vexations multiples.
Là commence l' alliance du judaïsme avec des tribus arabes
qui se traduisit par l'expansion du judaïsme dans la péninsule arabique. Après
une période de séduction réciproque, la religion judaïque et la religion
musulmane naissante entrèrent en conflit ouvert. Néanmoins, le gouvernement
central du judaïsme s'empressa d'emboîter le pas aux conquérants arabes et
après d'innombrables conversions en Afrique du Nord, finit par arriver dans la
péninsule ibérique dans laquelle ils rejoignirent une importante et prospère
communauté juive établie là depuis longtemps. En effet, les rois Wisigoths
accordaient leur protection aux Juifs établis de longue date et avaient permis
l'éclosion et d'une puissante communauté.
L'ultime déplacement officiel d'un Sanhédrin se produisit au
XVIIe siècle en direction de la Pologne où se trouvait concentrée une énorme
population de judaisants, dont personne n'avait entendu parler en Occident.
C'est là un sujet que les sionistes évitent soigneusement. L'historien Bernard
Lazare, juif lui-même, premier soutien du capitaine Dreyfus et auteur de
l'extraordinaire somme sur les origines historiques, ainsi que les causes
sociales et religieuses de l'évolution de l'antisémitisme principalement
européen, ne mentionne qu'en passant l'existence de cette masse de
co-religionnaires qui semblent surgis de terre comme des champignons après la
pluie.
Depuis le XIXe siècle, il n'existe plus de centre du pouvoir
juif officiel. Il n'en demeure pas moins vrai qu'un pouvoir omniprésent, mais
diffus, plus puissant que jamais, siège sur les rives du Potomak. Je reviendrai
sur ces points dans le prochain texte.
IIIème partie - Les textes fondateurs du gouvernement
central
A - La "loi écrite", la "loi orale"
"L'Éternel dit à Moïse: Monte vers moi sur la montagne
et reste là: je veux te donner les tables de pierre, la doctrine et les
préceptes, que j'ai écrits pour leur instruction." (Exode 24-12).
Les cinq Livres dits de la "loi écrite" ou Thora,
sont donc censés directement dictés et même rédigés personnellement par le dieu
Jahvé.
Pour résumer l'argumentaire de cet ensemble, disons qu'il
s'agit du récit des aventures théologico-onirico-politiques d'ancêtres
mythiques d'un groupe de nomades en train de conquérir leur espace vital et de
leurs relations avec un personnage surnaturel - un dieu local - lequel aurait
décidé, un beau jour, de se manifester à un chouchou afin de lui confier qu'il
allait dorénavant veiller tout spécialement sur le bonheur et la prospérité de
la tribu qu'il dirigeait. Certes, une contre-partie était prévue, dont les
clauses avaient été gravées sur deux blocs de granit. Néanmoins le contrat
était jugé profitable, puisque tous les membres de ces tribus se sont illico
auto-qualifiés de peuple "élu" ou "choisi" par leur
protecteur extra-terrestre. Depuis lors, ils clament que celui-ci leur aurait
non seulement "promis", mais donné un territoire particulier et leur
aurait conféré le droit et le pouvoir d'en chasser les premiers occupants, de
s'installer dans leurs maisons et de s'en attribuer la propriété ad vitam
aeternam, le tout en toute innocence, puisque réalisé à l'instigation et sous
la protection d'un notaire surnaturel. On voit clairement le passage de la
fiction à la réalité concrète.
Woody Allen a repris ce procédé artistique dans son film La
rose pourpre du Caire lorsque le héros du film traverse l'écran et s'installe à
côté de la jeune héroïne, simple spectatrice de la projection du film, pour
vivre avec elle moult aventures passionnantes. Le cinéaste américain a
génialement représenté le mécanisme psychologique par lequel un rêve prend
corps et devient "vérité" et "réalité" aux yeux du rêveur.
C'est par un mécanisme mental semblable à celui du film
d'Allen qu'un groupe d'humains a vu un jour un personnage surnaturel qu'il a
nommé Dieu, sortir de l'écran de son imaginaire bavarder avec l'un des siens,
conclure un contrat avec lui et sceller leur entente par le cadeau d'un
territoire. La bible est le récit de cette extraordinaire expérience
psychologique d'un groupe d'humains qui, depuis lors, continue de considérer
que les aventures qui se déroulent sur l'écran de son imaginaire constituent la
réalité de l'histoire.
La preuve absolue que le scénario biblique colle point par
point au scénario du film de Allen c'est que, de même que la jeune fille a
trouvé parfaitement normal que le héros d'un film qu'elle voyait pour la
cinquième fois vienne enfin à ses côtés et la prenne dans ses bras, de même
personne, ni hier, ni de nos jours, ne trouve anormal qu'il pourrait exister un
personnage extra-terreste, qui aurait fait un petit saut sur la terre ferme
pour s'exprimer avec un quidam dans la langue du pays et qui serait en même
temps l'heureux propriétaire de territoires parfaitement concrets, qu'on peut
toucher de ses mains et fouler de ses pieds, dont il aurait généreusement
offert une parcelle bien déterminée à des humains en chair et os. Le mélange de
magie et de réel donne à penser sur le fonctionnement mystérieux des souterrains
du psychisme humain.
Non seulement la métaphore d'un Abel génétiquement innocent
quels que soient ses crimes et d'un Caïn génétiquement coupable quoi qu'il
entreprenne est une ligne de force du récit biblique - "Yahvé agréa Abel
et son offrande. Mais il n'agréa pas Caïn et son offrande" Gn 4, 4-5). On
comprend parfaitement les motivations psychologiques et politiques
d'auto-justification de leur larcin que traduit le récit biblique, mais cette
notion se trouve si profondément incrustée dans l'inconscient actuel de ce
groupe humain qu'un rabbin, pourtant chargé de la "direction
spirituelle" de la branche lituanienne du judaïsme - Aharon Yehuda Leib
Shteinman - peut, au XXIe siècle, affirmer tranquillement et en public:
"Il y a huit milliards d'habitants dans le monde. Et que sont-ils? Des
assassins, des voleurs, des gens sans cervelle…". [4] Autrement dit, huit
à dix millions d'Abel innocents, "élus" par leur dieu font face à
huit milliards de voyous - de Caïn génétiques, voués aux gémonies.
Rabbin Aharon Yehuda Leib Shteinman
Le gouvernement sioniste moderne a parfaitement intégré
cette mentalité dans sa pratique quotidienne et c'est sans le moindre état
d'âme qu'Abel l'innocent, persécute jour après jour le Caïn palestinien,
coupable avant même sa naissance, mais qui s'accroche à sa terre au grand dam
d'Abel, lequel s'emploie, avec l'aide de son dieu, de sa bonne conscience et de
ses missiles, à vider "sa" terre sacrée de cette pustule polluante.
A partir des péripéties du récit se dessine le portrait d'un
dieu taquin et qui aimait les rébus. Il se serait donc manifesté d'abord durant
le rêve d'un vieillard présenté dans la fiction comme originaire de Mésopotamie
et appelé Abraham. Tous les membres de la tribu actuelle seraient ses
descendants. Les auteurs du récit se sont donc délibérément catalogués dès
l'origine comme une population étrangère à la Palestine, et donc comme des
colons conquérants et des étrangers.
Ensuite, on ne sait pas trop bien par quelle filiation, un
autre personnage mythique, Moïse, joue un rôle important dans la fiction,
puisqu'il est le messager en chair et en os qui rencontra le personnage
extra-terrestre. Les scripteurs à l'imagination un peu courte - et qu'on
pourrait qualifier de plagiaires - empruntèrent quelques épisodes de leur récit
à des fictions parallèles qui circulaient depuis des décennies dans d'autres
provinces du bassin méditerranéen, notamment en Egypte et en Babylonie où ils
résidaient à ce moment-là - quelle heureuse coïncidence! Ils ont donc pillé des
chapitres entiers de ces mythes antiques, notamment sur les circonstances
extraordinaires qui entourèrent la naissance de leur héros ainsi que la
description de plusieurs autres de ses exploits.
Ce personnage-clé aurait rencontré le grand protecteur de la
tribu à diverses reprises, tantôt sur une montagne, tantôt dans un désert.
C'est à l'occasion de ces rencontres que l'extra-terrestre lui aurait offert
les blocs de pierre évoqués ci-dessus. Le divin notaire aurait rédigé lui-même
le règlement auquel devrait se plier la conduite des membres de cette tribu,
règlement tellement semblable à celui qu'un ancien souverain mésopotamien avait
imaginé en son temps et appelé "code Hammurabi" qu'on se demande -
horribile dictu - s'il ne s'agirait pas d'un plagiat supplémentaire de la part
des auteurs. Mais en espèce, et afin que la scène frappe davantage les esprits,
c'est l'extra terrestre lui-même qui aurait gravé les dix commandements sur des
tablettes de granit qui se seraient précisément trouvées toutes prêtes à cet
endroit.
Voir: III - Israël, du mythe à l'histoire, 27 août 2010
Il semble que les rédacteurs de la fiction ne soient pas
parvenus à se mettre d'accord sur la meilleure manière de présenter la scène
puisqu'on se trouve en présence de deux versions bien différentes du même
évènement. "Jahvé parlait à Moïse face à face , comme un homme parle à son
ami " (Exode, 32,10), prétend l'un des auteurs. Il s'agirait donc d'un
dialogue entre amis, donc entre égaux. Pas du tout, affirme l'autre, Moïse n'a
pas vu le visage du dieu, il a juste senti le frôlement de sa main et l'a
aperçu de dos: "Tu ne peux voir ma face, car l'homme ne peut me voir et
vivre ! Voici un endroit près de moi ; tu te tiendras debout sur le rocher. Et
quand passera ma gloire, je te mettrai dans le creux du rocher et je te couvrirai
de ma main jusqu'à ce que je sois passé. Puis je retirerai ma main et tu me
verras de dos ; mais ma face, on ne peut la voir. " (Exode, 33 , 20-23)
Cette fois, une hiérarchie est clairement affirmée entre les deux
interlocuteurs: plus question de familiarité et d'égalité, l'homme ne peut voir
le dieu de ses yeux de chair. Il doit essayer de décrypter le mystère de la
gloire du passage du divin.
Les motivations théologiques des scripteurs sont
inconciliables en l'espèce. L'enjeu n'était pas mince, il s'agissait, au moyen
du récit, de préciser les statuts respectifs de l'homme et du Dieu.
Voilà résumé en termes délibérément non théologiques le
contenu de ce qui est censé constituer la Loi écrite. Mais les "docteurs
de la loi" ajoutèrent un point capital à la partie officiellement rédigée:
ils affirmèrent que, prudent et cachottier, le dieu aurait profité de ses
rencontres avec son messager doté d'une mémoire particulièrement excellente,
pour lui susurrer à l'oreille une foule de secrets auxquels ils sont les seuls
à avoir eu accès depuis lors. L'ensemble des secrets destinés à une élite est
appelé Loi orale.
Or, comme je l'ai rappelé ci-dessus, le récit des exploits
du dieu Jahvé et des ancêtres hébreux ont été portés à la connaissance des
Judéens par Esdras au cinquième ou au début du IVe siècle siècle avant notre
ère, selon la date retenue pour le retour du scribe en Judée. Celui-ci n'était
pas seulement un responsable religieux plein d'imagination et de talent,
c'était également un véritable esprit politique. En effet, en tant que porteur
des cinq chapitres du récit et chef de la Grande Assemblée et alors que le
texte lui-même ne dit rien de tel, il a réussi l'exploit politique d'imposer la
croyance que la citation ci-dessus implique qu'à côté de la Thora écrite, il
existerait une Thora orale dont le personnage de Moïse aurait été le
récipiendaire et le bénéficiaire.
Une multitude de secrets pratiques est censée avoir été
révélée au héros alpiniste au sommet de la montagne. Ces secrets auraient été
ensuite transmis, tout aussi secrètement, à son successeur, le non moins
mythique Josué, lequel les aurait communiqués, toujours oralement et
secrètement, à ses successeurs et ainsi de suite de génération en génération
durant deux millénaires.
Après avoir fait une petit halte politique qui avait permis
à Esdras de mener à bien ses réformes, les secrets révélés à Moïse auraient
repris leur petit bonhomme de chemin oral, avant de parvenir aux derniers
récipiendaires qui, confrontés au désastre de la destruction du temple et de
l'anéantissement de Jérusalem, s'étaient décidés à mettre le tout par écrit, ce
qui a abouti au premier siècle de notre ère au corpus de la Michna, puis à la
gigantesque compilation des deux Talmud que nous connaissons aujourd'hui. Celui
dit de Jérusalem, rédigé en araméen dans les localités de Galilée dans
lesquelles a séjourné le Sanhédrin et très partiellement en hébreu, fut achevé
à la fin du IVe siècle, au moment du départ de Tibériade. Quant au Talmud dit
de Babylone, il fut définitivement achevé vers l'an 700. Rédigé en hébreu et en
araméen babylonien, il représente le contenu de cinq mille volumes in-quarto!
Le mot Talmud signifie enseignement en hébreu littéraire.
B - La Thora orale et le principe d'autorité
L'invention de la notion de Thora orale est l'exploit
théologico-politique le plus extraordinaire et le plus efficace, politiquement
parlant, à mettre à l'actif du scribe Esdras. Elle est l'illustration la plus
remarquable du fonctionnement du principe d'autorité. A partir du moment où un
groupe se déclare détenteur de secrets surnaturels, son autorité est
démultipliée par le mystère et la sacralité dont il s'est entouré. Il serait
saugrenu et même sacrilège d'exiger des preuves ou des justifications de ce qui
est affirmé. Personne n'ose contester une autorité censée transmise de
génération en génération depuis deux millénaires et censée directement chue de
la nue. Elle finit par devenir in-contestable et donc sacralisée.
Voir: Manuel de Diéguez et l'étude du fonctionnement du
"principe d'autorité": - Les élections présidentielles et l'expression de la vérité politique - La France et la liberté de pensée, 8
avril 2012
C'est cette notion politique élastique qui a permis de mettre
sur le compte de la révélation divine les commandements les plus restrictifs,
les digressions les plus farfelues et les plus immorales, mais légitimées par
le sceau d'une "loi orale" révélée par une divinité.
Ainsi, l'autorité attachée à la détention de secrets divins
a permis à Esdras de faire fi de deux siècles de modifications politiques et
démographiques. C'est au nom de Jahvé que les "réformes" d'Esdras ont
imposé la purification ethnique qui, depuis lors, continue de s'appliquer dans
l'Etat sioniste moderne. Depuis les "réformes" d'Esdras, la politique
de la Judée a définitivement basculé dans la régression et la fermeture,
refusant toute forme d'intégration dans le courant de l'histoire en marche.
L'idéal religieux et social gît quelque part dans un lointain passé, un passé
imaginaire et mythifié, qu'il faudrait tenter de rejoindre. Pour Esdras, pour
ses contemporains, pour ses successeurs et pour le sionisme politique
contemporain, son héritier direct, comme dans le conte de La Belle au bois
dormant, le temps s'est immobilisé.
Les mythologues sionistes actuels s'apparentent à une varié
de de saumons. L'œil fixé sur un passé idéal, ils rament de toutes leurs forces
à contre-courant du fleuve du temps historique afin de tenter de ressusciter la
Dulcinée de leurs rêves blottie dans la frayère originelle, c'est-à-dire une
terre idéale, vide, donc sans intrus arabes et qui attendait leur retour, mais entretenue
durant deux millénaires par des légions de séraphins envoyés par Jahvé.
Face à ce délire psycho-théologique, l'existence des
Palestiniens ou la réprobation internationale ne sont que vulgaires cascades à
franchir. Or, l'on sait que les saumons sont capables de sauter des cascades de
trois mètres ou de profiter des inondations pour franchir des routes. C'est
pourquoi les sionistes s'appliquent à grignoter avec persévérance la
Cisjordanie et, par de vigoureux coups de queue, profitent de chaque circonstance
favorable pour construire de nouvelles colonies ou pour agrandir celles qui
sont déjà installées sur les territoires volés aux Palestiniens, espérant
arriver un jour à rejoindre la frayère mythique, avant que le mâle et la
femelle épuisés, aient succombé en route.
Esdras, épaulé par son comparse Néhémie, fut le saumon
athlétique qui le premier réussit cet exploit. C'est sous leur impulsion
conjuguée qu'ont été posées les fondations d'un jahvisme exclusiviste qui
reposait sur le principe de l'élection particulière de ce groupe humain et donc
sur la nécessité de nettoyer la population des éléments impurs et impies qui
s'étaient infiltrés sur la terre sacrée et l'avaient polluée de leur présence
intempestive. Avec une brutalité qui n'était possible qu'en ce temps-là, ce
scribe s'est mobilisé contre un siècle et demi de pratiques de mariages mixtes.
Non seulement de tels mariages seraient interdits à l'avenir, mais les femmes
légitimement épousées, ainsi que leurs enfants, devaient être expulsés du paradis
yahviste.
"Le pays [...] est souillé par la souillure des peuples
des pays (c'est-à-dire des étrangers), par les abominations dont ils l'ont
rempli d'un bout à l'autre par leur impureté. Et maintenant, ne donnez pas vos
filles à leurs fils, ne prenez pas leurs filles pour vos fils, ne recherchez
jamais ni leur prospérité, ni leur bonheur." Esdaras, 9,11-12
Lorsque le ministère de l'éducation de l'actuel Etat
sioniste propose lors d'un examen d’instruction civique en Israël d'expliquer
"pourquoi les jeunes filles juives ne doivent pas fréquenter les Arabes »,
il se place dans le sillage direct du racialisme d'Esdras. [5]
Du temps d'Esdras, la pureté des généalogies se comptait à
partir du début de l'exil. Or, entre le début de l'exil et le retour du scribe
- entre -538 et -393 - c'est pour le moins six à sept générations qui se sont
trouvées dans la ligne de mire de l'épurateur qui servira de modèle aux
épurateurs nazis qui recherchaient des demis, des quarts ou des huitièmes
d'ancêtres juifs chez leurs concitoyens persécutés.
Cet épisode tragique de l'histoire récente permet d'imaginer
ce que fut la chasse aux femmes légitimement épousées, ainsi qu'à leurs enfants
traqués par des fanatiques qui sillonnaient les ruelles et pénétraient dans les
maisons. Certains cachèrent les enfants, quelques-uns résistèrent, mais
l'immense majorité non seulement se soumit aux directives du fanatique
réformateur, mais offrit des sacrifices expiatoires. Telle est la puissance du
principe d'autorité.
Pour comprendre la profondeur du choc, de la terreur et du
traumatisme social qui accompagnèrent cette mesure, il faut imaginer ce que
serait aujourd'hui une France dont la population subirait une épuration
ethnique sur la base d'un recensement de la population datant du règne de
Napoléon III!
En revanche, les femmes juives pouvaient conserver un mari
non juif, ainsi que leurs enfants. C'est à partir de cet épurateur du quatrième
siècle avant notre ère que l'identité juive a été définie à partir de la
descendance par les femmes. Ainsi, aujourd'hui encore, des rabbins orthodoxes
qui ont pris le pouvoir dans l'Etat d'Israël ont annulé certains mariages
lorsque la femme ne correspondait pas aux critères de la définition orthodoxe
de la judéité. Or, il n'existe pas de mariage civil dans cet Etat. Voilà bien
la preuve absolue qu'Esdras est toujours vivant dans les têtes et dans les lois
et qu'une ségrégation ethnique drastique continue en plein XXIe siècle d'être
sournoisement appliquée sur le terrain, tout en étant officiellement niée.
Le Talmud enseigne explicitement qu'une descendance fait
partie de "nos enfants juifs", seulement si la mère est juive.
(Talmud, Guemara Kidouchine : Daf 68b) Le sionisme est également redevable aux
institutions mises en place par les deux compères Esdras et Néhémie, de la
pérennisation d'un système exécutif, législatif et judiciaire si puissant qu'il
ont survécu à la disparition politique du petit Etat originel, à la destruction
de l'édifice religieux central autour duquel se cristallisait toute la vie
sociale et surtout, il ont survécu à la dispersion de la population.
Durant deux millénaires, cette Loi orale serait passée
"d'oreille de sage" en "oreille de sage" par une chaîne
ininterrompue de rabbins - de maîtres - et sa transmission aurait été si
parfaite que sa mise par écrit dans les Talmud possède le même poids que le
texte primaire de la Thora. Dans la pratique, elle en a même davantage.
"Le Juif qui suivait ces préceptes s'isolait du reste
des hommes ; il se retranchait derrière les haies qu'avaient élevées autour de
la Torah Esdras et les premiers scribes, puis les Pharisiens et les Talmudistes
héritiers d'Esdras, déformateurs du mosaïsme primitif et ennemis des prophètes.
Il ne s'isola pas seulement en refusant de se soumettre aux coutumes qui
établissaient des liens entre les habitants des contrées où il était établi,
mais aussi en repoussant toute relation avec ces habitants eux-mêmes. À son
insociabilité, le Juif ajouta l'exclusivisme. " Bernard Lazare,
L'Antisémitisme
Or, c'est cette notion de "loi orale", absolument
invérifiable et totalement laissée à la discrétion des "récepteurs"
et censée éclairer la "loi écrite", qui a donné toute sa puissance à
la recréation d'un judaïsme post-exilique. Cette invention politique de
"sages", prétendument transmetteurs du message secret d'un dieu qui
parlerait par leur bouche ouvre aux psychanalystes et aux anthropologues des
religions un continent à explorer. Car il est impossible de ne pas voir que ces
commentateurs s'identifient si bien à leur dieu qu'ils sont, en réalité, Jahvé
lui-même.
En même temps, ce type de "transmission" évoque
irrésistible le "jeu du téléphone" auquel se livrent ou se sont
livrés tous enfants du monde: le premier de la chaîne chuchote une phrase à
l'oreille du suivant et ainsi de suite jusqu'au bout de la chaîne et la phrase
déclamée par le dernier provoque en général un immense éclat de rire, tant elle
se révèle cocasse par rapport à la phrase originelle. C'est pourquoi on trouve,
au bout de la chaîne du "jeu du téléphone talmudique" certaines
considérations rationnelles de gestion politique et sociale, à savoir un code
civil, un code fiscal et même un manuel d'agriculture, un manuel de médecine,
mais aussi mille et une digressions sur les sujets les plus variés, des plus
absurdes aux plus vulgaires.
Dans cet ensemble utilisé actuellement pour la formation des
rabbins et qui se prétend une compilation de la "tradition des
anciens", une partie est consacrée à la formulation d'une opinion sur tel
ou tel sujet, laquelle est contredite ou développée par celle d'un second
rabbin et un troisième rabbin est censé effectuer une sorte de synthèse, ce qui
explique sa présentation.
Une page du Talmud
Mais voici également un petit florilège de certaines
"méditations" des "sages talmudistes":
Erubin 21b. "Quiconque désobéit aux rabbins mérite la
mort et brûlera en enfer dans des excréments bouillants."
Moed Kattan 17a . "Si un Juif est tenté de faire le
mal, il doit aller dans une cité où il n'est pas connu et y faire le mal."
Baba Mezia 114a-114b. "Seuls les Juifs sont des hommes
"
Sanhedrin 58b. "Si un Gentil frappe un Juif, il doit
être tué. Frapper un Juif est la même chose que frapper Dieu."
Sanhedrin 57a . "Un Juif n'a pas à payer un Gentil le
salaire de son travail."
Baba Mezia 24a .2 Si un Juif trouve un objet perdu par un
Gentil, il n'a pas à le retourner "
Sanhedrin 57a . Quand un Juif tue un Gentil, il n'y a pas de
peine de mort. Ce qu'un Juif vole à un Gentil, il peut le garder "
Baba Kamma 113a. "Les Juifs peuvent user de subterfuges
pour circonvenir un Gentil"
Yebamoth 98a. "Tous les fils des Gentils sont des
animaux."
Abodah Zarah 36b . "Les filles de Gentils sont souillées
depuis la naissance."
Abodah Zarah 22a-22b . "Les Gentils préfèrent le sexe
avec les vaches."
Sanhedrin 43a . "Le nazaréen a été exécuté parce qu'il
pratiquait la sorcellerie."
Gittin 57a . dit que "Jesus est en train de mijoter
dans des excréments bouillonnants."
Rosh Hashanah 17a . "Ceux qui rejettent le Talmud iront
en enfer et seront punis pour des générations à venir."
Shabbath 116a . "Les Juifs doivent détruire les livres
des chrétiens3"
Shabbath 41a. définit la manière d'uriner correctement
Yebamoth 63a. affirme que Adam a eu des relations sexuelles
avec tous les animaux du Jardin d'Eden.
Sanhédrin 52b. L'adultère n'est pas défendu avec la femme
d'un goy, parce que Moïse n'a interdit que l'adultère avec "la femme de
ton prochain", et les goys ne sont pas des prochains.
Abhodah Zarah 54a. L'usure peut être pratiquée sur les
goyim, ou sur les apostats.
Choschen Ham 226, 1. Les juifs peuvent garder sans s'en
inquiéter les affaires perdues par un goy.
Iore Dea 157, 2 hagah. Si un juif a la possibilité de tromper
un goy, il peut le faire.
Babha Kama 113a. Les incroyants ne bénéficient pas de la loi
et Dieu à mis leur argent à la disposition d'Israël.
Schabbouth Hag. 6d. Les juifs peuvent jurer faussement en
utilisant des phrases à double sens, ou tout autre subterfuge.
Je renonce, pour des raisons de décence dans ce site, de
citer les élucubrations sur la pédophilie avec un petit garçon de moins de 9
ans et un jour (Sanhédrin 69a) , de plus de 9 ans et un jour (Kethuboth,
11a-11b), sur les relations sexuelles avec une femme qui a ses règles (Hayorath, 4a), sur les conditions de l'acte sexuel d'une femme avec un animal
(Yebamoth, 59b); sur celui d'un homme avec un enfant non juif (Sotah, 26b)
......... et que dire de:
Sanhédrin, 55b : " Une petite fille de trois ans et un
jour peut être acquise en mariage par coït, en cas de mort de son mari et si
elle a un rapport sexuel avec le frère de son mari, elle devient à lui précise
encore Kethuboth, 11a-11b
Ces formulations seraient dignes de figurer dans le Guinness
des absurdités grotesques si elles n'avaient, de nos jours, des conséquences
tragiques sur le comportement d'immigrants imbibés d'une mentalité talmudique
prise au pied de la lettre, y compris dans ses déclarations les plus stupides
et les plus immorales. Elle se traduit sur le terrain par la désinvolture avec
laquelle l'armée sioniste tue des enfants palestiniens traités "d'insectes"
engendrés par des "abrutis".
"Ici, en Israël, la façon dont nous traitons les
enfants palestiniens a longtemps été guidée par l'adage: "Les abrutis
engendrent des insectes". Certains le disent ouvertement, d'autres
partagent ce point de vue en silence. Il n'y a pas de mois sans que plusieurs
enfants palestiniens soient tués sous des prétextes douteux, que personne ne
comprend." [6]
Hourrah! Un redoutable groupe de terroristes palestiniens capturés par
"l'armée la plus morale du monde"
Il existe une seule traduction officielle et annotée du
Talmud accessible en langue vernaculaire: il s'agit de l'édition anglaise parue
en 1935 chez Soncino Press en cinquante cinq gros volumes. Dans l’Histoire du
Talmud, de Michael Rodkinson et du rabbin Isaac M. Wise - dont j'ai cité
l'activisme pro-sioniste dans mon texte sur le Colonel House, (Voir : - Du Système de la Réserve fédérale au camp de concentration de Gaza : Le rôle d'une éminence grise: le Colonel House, 3 février 2010 ) nous avons un exemple de la
manière les co-religionnaires contemporains jugent cette masse d'écrits? On
peut lire en conclusion du premier volume:
"Le Talmud est l’une des merveilles du monde. À travers
les vingt siècles de son existence il a survécu dans son intégralité, et non
seulement ses ennemis n’ont pas réussi à en détruire une seule ligne, mais
encore ils n’ont pas même été capables d’en diminuer le rayonnement à une
époque quelconque. Le Talmud domine toujours les esprits d’un peuple tout
entier, qui vénère son contenu comme vérité divine (...). Des écoles destinées
à l’enseignement du Talmud apparaissent et se multiplient dans presque chaque
ville où Israël est présent, et particulièrement dans ce pays [les Etats-Unis]
où des millions sont collectés pour les caisses de deux universités : le Hebrew
Union College de Cincinnati, et le Séminaire de Théologie Juive d’Amérique de
New York, et dans lesquelles l’objet d’étude principal n’est autre que le
Talmud."
Histoire du Talmud, de Michael Rodkinson et du rabbin Isaac
M. Wise. Cité par Benjamin H. Freedman in Facts are Facts, The Truth about the
Khazars, lettre adressée au Docteur David Goldstein ) (C'est moi qui souligne)
Lorsque le "guide" dit "spirituel" du
mouvement sioniste Shass, le rabbin Ovadia Youssef recommande aujourd'hui aux
médecins juifs de ne pas soigner les malades non juifs les samedis, il se situe
dans la droite ligne du Talmud. Or le Talmud, c'est la loi en marche, la loi en
action, la loi dans toute sa précision, sa contrainte et la dureté de son
application quotidienne. C'est pourquoi il n'y a rien d'étonnant de l'entendre
proférer tranquillement qu'au "cas où un non juif blessé dans un accident
de voiture est transporté à l'hôpital le samedi, Israël ne doit pas le soigner,
parce que la Thora interdit toute infraction aux enseignements prescrits en
cette journée pour toute personne non juive". [7]
Rabbin Ovadia Youssef
Monsieur le rabbin, ce genre de recommandation ne figure pas
dans la Thora. On trouve dans cet ensemble d'innombrables injonctions
d'assassiner les membres de groupes entiers au cours de guerres tribales
victorieuses, (voir: - 5 - La théocratie ethnique dans le chaudron de
l'histoire, 3 janvier 2011, Tableau en annexe) mais les rédacteurs de ces
livres ne se sont pas abaissés jusqu'à prévoir le genre de mesquineries
qu'évoque le vieux rabbin. Il semble éprouver une certaine réticence à se
référer officiellement au Talmud , lequel n'a pas hésité à se pencher sur les
détails les plus futiles et les plus vulgaires, comme le révèlent les quelques
exemples, parmi des milliers d'autres, relevés ci-dessus. Un des premiers
exégètes chrétiens, Irénée, ricanait déjà à ce sujet: "Au lieu de vous
exposer le sens des prophéties, vos maîtres s'abaissent à des niaiseries ; ils
s'inquiètent de savoir pourquoi il est question de chameaux mâles à tel et tel
endroit, pourquoi telle quantité de farine pour vos oblations." (Irénée,
Dialogue avec Tryphon)
Même s'ils prétendent se référer officiellement à la Thora,
comme le font le rabbin lituanien ou le rabbin sioniste cité ci-dessus, c'est
dans le Talmud que les sionistes trouvent l'essentiel de leur inspiration.
Comme le reconnaît le grand spécialiste de l'histoire du judaïsme, Bernard
Lazare, c'est bien le Talmud qui servit de nourriture principale à toutes les
communautés dispersées dans le monde entier et qui a joué le rôle de fédérateur
entre elles.
"Une chose [...] maintint les Hébreux parmi les peuples
: ce fut l'élaboration du Talmud, la domination et l'autorité des docteurs qui
enseignèrent une prétendue tradition, mais cette action des docteurs, sur
laquelle nous reviendrons, fit aussi des Juifs les êtres farouches, peu
sociables et orgueilleux dont Spinoza, qui les connaissait, a pu dire: cela
n'est point étonnant qu'après avoir été dispersés durant tant d'années, ils
aient persisté sans gouvernement, puisqu'ils se sont séparés de toutes les autres
nations, à tel point qu'ils ont tourné contre eux la haine de tous les
peuples." Bernard Lazare, L'antisémitisme
Dans la citation de Bernard Lazare, je demande pardon à
Spinoza de relever un point erroné: certes, durant de nombreux siècles, les
Juifs n'avaient pas disposé d'un Etat et d'un territoire au sens moderne du
terme, mais un gouvernement théocratique central puissant a toujours existé, y
compris officiellement, et cela jusqu'au XVIIIe siècle. Depuis lors, ce pouvoir
est plus diffus, lié à la puissance financière des grandes banques
anglo-saxonnes, à l'emprise des groupes sionistes sur les institutions
américaines et à celle de l'empire sur l'Europe ainsi que sur une grande partie
du monde.
*
IVè partie - De l'utilité d'avoir un ennemi
Le judaïsme ritualiste de l'exil a eu la chance, si je puis
dire, d'avoir un ennemi. Sans cet ennemi, il n'y aurait pas eu de Talmud(s),
donc pas de fédérateur quasiment policier qui a permis à ce mouvement
politico-religieux de se maintenir uni durant des siècles en raison de la
précision et de la sévérité des règles auxquelles les membres devaient se
soumettre. C'est ainsi que près de deux millénaires après sa disparition
politique on l'a vu, tel le Phénix, renaître de ses cendres en se réincarnant
dans le sionisme messianique.
A - Le judaïsme face au christianisme naissant: le Talmud de
Jérusalem
La doxa contemporaine prêche que "Jésus était un
Juif" et que c'est par pure sècheresse de coeur et raideur de leur nuque
que le groupe dominant des Pharisiens a refusé son enseignement, si bien que le
Sanhédrin a fini par le livrer au bras séculier romain. Or, Jésus et onze de
ses compagnons de la première heure étaient Galiléens - seul Judas, comme son
nom l'indique, était hiérosolymite.
J'ai montré dans le texte précédent (Voir: - 11 - "Nous sommes un peuple...", 14 mars 2012 ) que les docteurs de la loi de
Jérusalem méprisaient cordialement les provinciaux galiléens et ne leur
manifestaient pas davantage de considération qu'aux "goims",
c'est-à-dire au reste du monde. "Que peut-il venir de bon de
Nazareth?" disait-on en Judée. Et pourtant les Galiléens, eux,
considéraient qu'ils faisaient partie des fidèles de Jahvé. Mais leur
attachement aux rites du judaïsme était insuffisant, aux yeux des Pharisiens,
qui voyaient en eux un peuple impur, parce qu'ethniquement mélangé, un peuple
fruste et ignorant des subtilités de la Thora et qui, à leurs yeux, pratiquait
un judaïsme "canada dry" dont ils ne comprenaient ni la profondeur,
ni les subtilités. De son vivant, Jésus a d'ailleurs eu des mots très durs
contre les Pharisiens et les Evangiles s'en font l'écho.
Mt 23, 27 : "Malheur à vous, maîtres de la loi et
Pharisiens, hypocrites ! Vous ressemblez à des tombeaux blanchis qui paraissent
beaux à l'extérieur mais qui, à l'intérieur, sont pleins d'ossements de morts
et de toute sorte de pourriture. Gardez-vous des scribes, qui se plaisent à se
promener en longues robes et qui aiment les salutations dans les places
publiques, et les premiers sièges dans les synagogues, et les premières places
dans les repas; qui dévorent les maisons des veuves, et pour prétexte font de
longues prières; ceux-ci recevront une sentence plus sévère.
Marc 7,6-9 : " Isaïe a bien prophétisé sur vous,
hypocrites, ainsi qu'il est écrit : Ce peuple m'honore des lèvres, mais son
cœur est loin de moi. (…) Vous rejetez bel et bien le commandement de Dieu pour
garder votre tradition. "
Mt 23,13 : "Malheur à vous, scribes et Pharisiens
hypocrites, parce que vous fermez au nez des hommes le royaume des cieux !
Luc , 11, 39 : Vous voilà bien, vous, les Pharisiens !
L'extérieur de la coupe et du plat, vous le purifiez, alors que l'intérieur est
plein de rapine et de perversité.
Ces quelques exemples parmi de nombreux autres prouvent que
les chrétiens du premier siècle répondaient du tac au tac aux insultes des
Pharisiens talmudistes.
Durant les années qui ont suivi la crucifixion du trublion
Jésus, les orgueilleux docteurs de la loi n'ont pas daigné se soucier du petit
groupe de Galiléens qui utilisaient les synagogues pour diffuser l'enseignement
de leur maître. Ils commencèrent à s'inquiéter lorsqu'ils virent que leurs
propres ouailles étaient sensibles à la douceur d'une religion moins
ritualiste. Comme les premières communautés chrétiennes ont été fondées à
partir des synagogues, la multiplication des conversions, fruit de l'efficacité
du prosélytisme des compagnons de Jésus, a fini par provoquer l'hostilité, puis
la fureur des rabbins. Dépossédés par des intrus qui sapaient "leur"
judaïsme - et donc leur pouvoir - à l'intérieur même de leurs maisons de
prières, les docteurs de la loi exilés dans la petite ville de Yavneh, ont
réagi en rédigeant les interdits et les anathèmes qui figurent dans le Talmud
dit de Jérusalem.
Les causes dogmatiques n'ont pas été les uniques
responsables du conflit entre le judaïsme orthodoxe et les judéo-chrétiens. Un
contentieux politique aigu avait pourri l'atmosphère entre les deux communautés
avant même la grande révolte des années 68-70. Pendant qu'un christianisme
dépolitisé - "Rendez à César ce qui est à César" disait la nouvelle
religion - un christianisme bucolique et sentimental qui parlait surtout
d'amour et de partage et qui s'édifiait à l'ombre des synagogues, la Judée
connaissait une violente agitation nationaliste. Il ne s'agissait pas, pour ce
parti, de "rendre" quelque hommage ou quelque obéissance que ce soit
à César, mais de chasser César de la "terre promise". Le conflit
opposait donc une religion nationaliste à un mouvement religieux en formation
et a-politique.
Menée par le parti ultra fanatique et ultra nationaliste des
Zélotes, accompagnés par les inventeurs du "terrorisme politique" -
les Sicaires du nom du petit poignard, sica, caché dans leurs vêtements dont
ils frappaient les Juifs qui collaboraient avec les Romains, d’où leur nom -
une guerilla a harcelé les légions romaines et tous les Juifs soupçonnés de
collaboration avec l'occupant. Les Sadducéens - les prêtres du temple - étaient
visés en priorité en raison de leur indulgence pour les moeurs des Romains. Les
Sicaires étaient des tueurs redoutables qui parcouraient la province et
semaient la terreur, une révolte permanente et meurtrière a agité la province
de Palestine durant plusieurs décennies et les moyens les plus meurtriers ont
été utilisés par des nationalistes fanatiques et ultra orthodoxes de l'époque.
Ces Sicaires sont également les inventeurs de l'attentat anonyme: durant les
grands rassemblements, grâce à leur habileté à jouer du poignard et à des
talents de comédiens hors pair, ils frappaient leur victime, puis étaient les
premiers à se lamenter à grand bruit une fois le meurtre accompli. Profitant du
brouhaha, ils s'éclipsaient dans la foule.
Lorsque la Judée se souleva contre Rome durant les grandes
révoltes qui aboutit à la destruction du temple et de la ville de Jérusalem en
l'an 70, non seulement les judéo-chrétiens qui résidaient dans la capitale de la
Judée ne se sont pas sentis concernés par un nationalisme lié à une terre -
"Mon royaume n'est pas de ce monde" avait annoncé Jésus - mais ils ne
participèrent pas au combat et s'enfuirent de l'autre côté du Jourdain. Lorsque
la répression s'abattit sur la Judée après la défaite, la Galilée fut épargnée
car les Galiléens, méprisés depuis toujours, ne se sont pas précipités au
secours de Jérusalem. Aucun de ces petits paysans galiléens ne fut tourmenté
par les Romains ou exilé. Ils demeurèrent tranquillement chez eux et les
Palestiniens actuels sont, selon toute vraisemblance et logique leurs
descendants directs.
Il en fut de même lors de la deuxième grande révolte
nationaliste menée par le "fils de l'étoile" - Bar Kochba - mâtée par
les légions de l'empereur Hadrien. Cette fois, les Galiléens participèrent même
à la répression contre les Judéens et prêtèrent main-forte aux Romains.
Les Judéens ont alors pris conscience que les nouveaux
croyants qu'ils côtoyaient dans leurs maisons de prières n'étaient pas des
patriotes et des défenseurs de la "terre promise". La rupture fut
donc d'abord politique.
C'est dans cette atmosphère religieuse et dans ce contexte
politique que fut rédigé à Javneh le Talmud dit "de Jérusalem". Il
s'agit donc d'abord d'un règlement de compte dirigé contre les apostats
judéo-chrétiens. L'objectif était de freiner de nouvelles conversions qui
dépeuplaient et affaiblissaient l'ancienne religion. On comprend mieux le
pourquoi des malédictions et des insultes contenues dans ces textes.
Comme on le voit, la motivation des rabbins qui rédigèrent
le premier Talmud est politiquement rationnelle et se trouve directement liée à
l'environnement politico-religieux qui existait au moment de sa rédaction. Elle
n'a donc pas de rapport avec la rationalisation invoquée a posteriori de
l'existence d'une "Thora orale" dont le contenu aurait été délivré
deux millénaires auparavant par le dieu de la tribu.
B - Le judaïsme et le christianisme avant la conversion de
Constantin
Les premiers pas du christianisme naissant furent
difficiles. Aux persécutions des Romains s'ajoutèrent celles des Juifs. En
effet, Rome était, d'une certaine manière, une théocratie symbolisée par le
culte de l'empereur. Toutes les fonctions publiques étaient à la fois civiles
et religieuses. Les actes publics n'étaient valables que s'ils étaient
accomplis selon un certain rite, parfaitement défini.
L'irruption d'une nouvelle religion gênait à la fois la
religion institutionnelle des Romains et le judaïsme institutionnel qui, à
partir des nombreuses colonies établies dans l'empire depuis des dizaines
d'années bénéficiait d'un statut privilégié, qui lui donnait le droit d'exercer
librement son culte, de disposer de sa propre organisation judiciaire et même
d'avoir une autonomie financière et d'envoyer des sommes importantes à
Jérusalem pour l'entretien du temple. Les privilèges accordés aux Judéens par
Jules César suscitaient d'autant plus la jalousie et la colère de ceux qui en
étaient privés que ceux qui en jouissaient se montraient d'une arrogance
querelleuse: ils prétendaient à la fois conserver leurs mœurs et leur particularisme
tout en bénéficiant des avantages communs aux sujets de l'empire.
"Jules César, empereur [...] et souverain pontife ;
nous avons, après en avoir pris conseil, ordonné ce qui suit; comme Hyrcan II
fils d'Alexandre, juif de nation, nous a de tout temps donné des preuves de son
affection, tant dans la paix que dans la guerre, ainsi que plusieurs généraux
d'armées nous en ont rendu témoignage, nous voulons que lui et ses descendants
soient à perpétuité princes et grands sacrificateurs des Juifs, pour exercer
ces charges selon les lois et les coutumes de leur pays ; comme aussi qu'ils
soient nos alliés et du nombre de nos amis ; qu'ils jouissent de toutes les
lois et privilèges qui appartiennent à la grande sacrificature ; et que, s'il
arrive quelque différend touchant la discipline qui se doit observer parmi ceux
de leur nation, il en soit le juge ; et qu'il ne soit point obligé de donner
des quartiers d'hiver aux gens de guerre, ni de payer aucun tribut…".
Cité par Flavius Joseph, Histoire des Juifs XIV-17. (C'est
moi qui souligne)
J'ai déjà évoqué l'efficacité du prosélytisme juif et
l'importance des centres judaïsants qui avaient fleuri dans tout le bassin de
la Méditerranée: en Egypte depuis des décennies, en Babylonie et en Perse
depuis l'exil, à Rome, en Grèce et dans les îles environnantes, en Asie Mineure
(dans l'actuelle Turquie), en Cyrénaïque (l'actuelle Lybie) et jusqu'en
Espagne, où de nombreux émigrants juifs avaient établi de puissantes colonies
durant les grandes guerres contre l'empire sous les règnes de Vespasien, de Titus,
puis d'Hadrien. Ils y vécurent heureux, riches et puissants jusqu'à la
conversion des rois Wisigoths au christianisme. Un prosélytisme ardent et la
prospérité de la communauté attiraient moult candidats si bien que les
conversions de la population locale étaient si nombreuses que l'Espagne des
premiers siècles a failli basculer tout entière dans le judaïsme. Mais ces
nouveaux judaïsants ne partageaient nullement le nationalisme territorial des
descendants d'Esdras et de Néhémie. Jérusalem n'étaient pour eux qu'une
métaphore religieuse.
La défense de leur statut dans l'empire supposait
l'élimination de la nouvelle religion avec laquelle ils ne voulaient pas que
les Romains les confondissent. Mais lorsque se développa le dogme sacrilège de
la divinisation de Jésus, le fossé fut impossible à combler et la fureur des
rabbins devint impitoyable, si bien que les Juifs participèrent activement aux
persécutions de chrétiens aux côtés des Romains. Mais ils en voulaient surtout
aux judéo-chrétiens, ces apostats, ces traîtres passés à l'ennemi. "Les
Évangiles doivent être brûlés, dit le rabbin Tarphon, car le paganisme est
moins dangereux pour la foi judaïque que les sectes judéo-chrétiennes."
(cité par Bernard Lazare) Les malédictions contenues dans le Talmud rédigé à
Yavneh, puis à Babylone visent avant tout les Juifs convertis.
Lorsque l'un de ces Juifs convertis, Saül, devenu l'apôtre
Paul, premier législateur du christianisme et premier prosélyte de la nouvelle
religion - qui courait de synagogue en synagogue dans les villes du bassin de
la Méditerranée, comme en témoignent ses épîtres - lorsqu'il déclara que le
christianisme pouvait et devait se passer du signe concret de l'alliance du
"peuple élu" avec son dieu - la circoncision - ce fut le scandale absolu
et le sacrilège impardonnable. La rupture avec le judaïsme fut consommée et la
nouvelle religion ayant cessé d'être une secte juive, pouvait commencer sa
conquête du monde et devenir "catholique", c'est-à-dire universelle.
C - La conversion de Constantin et la consolidation
politique de l'identité juive face au christianisme
La situation des Juifs se gâta sérieusement lorsque
l'empereur Constantin (272-337), né dans l'actuelle Serbie et nommé par les
légions de Bretagne, arriva au pouvoir. Il avait d'abord poursuivi la politique
de tolérance religieuse classique de Rome à l'égard des nationalités qui
composaient l'empire et des innombrables dieux des peuples vaincus et
incorporés dans le panthéon officiel romain, mais son attitude changea envers
les Juifs au fur et mesure que l'influence des chrétiens de son entourage
devenait plus prégnante.
Rapporté par deux hagiographes du christianisme naissant -
Lactance dans De la mort des persécuteurs et Eusèbe de Césarée dans sa Vie de
Constantin - un évènement capital et particulièrement nocif pour les adorateurs
du dieu Jahvé se produisit dans la nuit du 21 octobre 312: l'empereur fit un
rêve. On sait comme le rêve d'un autre personnage aussi éminent que mythique
joua un rôle déterminant dans la mise en place du yahvisme post-exilique - je
veux parler du rêve d'Abraham, le grand ancêtre.
Voir : 10 - La chimère du "Grand Israël",18 janvier 2012
Je rappelle que je m'en tiens aux faits historiquement
avérés et à leur sens politique. Quant à l'élaboration théologique et à
l'incarnation dans le temps historique de personnages de fiction ou de symboles
religieux, il s'agit de métamorphoses d'ordre psychologique ou théologiques qui
n'ont aucun rapport avec la réalité historique. Abraham, Moïse, Don Quichotte,
Hamlet, Othello, le Cid, le Tartuffe, le bonhomme Grandet, Rastignac ou Julien
Sorel cohabitent harmonieusement dans le grand Panthéon de notre imaginaire
fictionnel et symbolique.
Or, en cette nuit du 21 octobre de l'an 312, le futur
empereur Constantin s'apprêtant à livrer contre son rival Maxence une bataille
décisive et ses troupes déjà massées près de l'un des ponts les plus importants
de Rome - le Pont Milvius - eut un songe prémonitoire: le nouveau dieu Jésus
lui serait apparu en personne et lui aurait montré dans le ciel un signe - un
chrisme symbolisant sa personne et formé des lettres grecques (chi) et (rhô),
les deux premières lettres de Chrestos - et lui aurait dit distinctement, et en
latin, In hoc signo vinces - Par ce signe tu vaincras.
Chrisme
Or les textes fondateurs du christianisme - les Evangiles -
sont rédigés en grec et du temps où il arpentait les routes de Galilée, Jésus
s'exprimait en araméen. Personne n'a suggéré que Jésus aurait été familier de
la langue latine. Il s'agirait donc d'un miracle supplémentaire.
Comme toute l'armée de Constantin avait vu le même chrisme,
des astronomes intrigués ont reconstitué la position des planètes et ils ont
établi que, cette nuit-là, les planètes se trouvaient dans une configuration
rare qui rappelait, en effet, la forme de ce signe.
Chrisme - sculpture dans une église catholique
L'interprétation de cette réalité astronomique était
d'autant plus fondée que cette forme était connue en Grèce. Il s'agissait de
l'abréviation du mot chrêstos qui signifie "utile, de bon augure". Ce
mot servait aux Grecs d'exclamation approbative. Le glissement entre les sens
de chrêstos et Christos représentés par le même dessin était quasiment naturel.
Quant à la phrase en latin que l'empereur Constantin prétend
avoir entendue, elle possède autant de vraisemblance que celle qu'aurait
entendue Abraham, le mythique ancêtre fondateur de la tribu originelle des
Hébreux, dans la seule langue qu'il aurait pu comprendre, à savoir l'araméen
babylonien. En ce temps-là les dieux étaient particulièrement bavards et
polyglottes.
Toujours est-il que Constantin gagna sa bataille contre
Maxence et en attribua immédiatement le mérite à la protection du nouveau dieu.
Les conséquences de ce songe de Constantin furent
catastrophiques pour les adorateurs du dieu Jahvé. A partir de cette époque,
les persécutions qui avaient jusqu'alors frappé les disciples du dieu chrétien
et auxquelles les Juifs avaient largement participé, se retournèrent contre
eux. Les mariages entre juifs et chrétiens furent interdits et les
transgresseurs furent condamnés à mort. Le prosélytisme juif fut réprimé et le
Sanhédrin fut interdit.
Victimes d'une législation anti-juive, d'explosions de
violence, contraints de payer de lourds impôts, présentés comme les assassins
de Jésus et devenus un peuple déicide dans les sermons des prêtres, les Juifs,
après avoir été parmi les persécuteurs des premiers chrétiens, devinrent à leur
tour des persécutés dans toutes les provinces de l'empire.
D - Le Talmud de Babylone et la codification de
l'exceptionnalisme juif
Les exilés volontaires qui avaient rejoint en grand nombre
les élites judéennes emmenées en Mésopotamie par Nabuchodonosor au VIe siècle
avant notre ère, avaient fini par constituer un "Etat juif" à
l'intérieur de l'empire perse. L'historien juif Flavius Josèphe mentionne son
existence. Sa direction politique était assurée par un Exilarque, un
fonctionnaire de l'empire appelé resh galuta en araméen. Ainsi ce "chef de
l'exil" disposait d'une suite armée, d'une police, de finances alimentées
par une fiscalité propre et d'une juridiction civile et religieuse.
Lorsque le Sanhédrin se sentit contraint de quitter la
province de Palestine sous administration d'un empire romain devenu chrétien,
il lui fallut jouer des coudes pour se faire une place en Babylonie, à côté,
puis à la place des autorités de l' "Etat juif babylonien" déjà
existant. L'autorité morale et théologique liée à sa fonction de détenteur de
la Loi divine lui permit de triompher rapidement de son rival grâce à l'intense
activité des nombreuses écoles religieuses, ou "académies" qui ont
grouillé sur les bords de l'Euphrate et produit durant les quatre siècles de
résidence du Sanhédrin en Mésopotamine, l'équivalent de cinq mille in-quarto,
comme je l'ai rappelé ci-dessus, d'interprétations, de commentaires, de
digressions, de malédictions, de suggestions, d'interdictions, de
recommandations, de condamnations, le tout censé expliciter à la fois la
"loi écrite", ou Thora et ce qu'ils nommaient la "loi
orale" dont ils se déclaraient les ultimes dépositaires. L'ensemble de ces
cogitations devint le Talmud dit "de Babylone".
Des "excellences" - les Géonim, pluriel de Gaon -
présidaient ces écoles religieuses.
Le Gaon de Pumbédita finit par éclipser l'Exilarque et
devint une sorte de souverain et son "académie" joua le rôle d'une
manière de chancellerie auprès de laquelle les communautés dispersées dans le
monde entier envoyaient des ambassadeurs porteurs de dons destinées à
l'entretien des innombrables rabbins qui peuplaient ces écoles religieuses. Les
consultations portaient sur les questions les plus diverses, relatives non
seulement à la doctrine et aux pratiques religieuses, mais à tous les sujets
concernant la vie du groupe, les mariages, les relations avec les non juifs,
les malédictions contre le fondateur du christianisme, sa mère, ses disciples,
les chrétiens et les non-juifs en général, tous sujets qu'on retrouve
aujourd'hui dans la masse gigantesque du Talmud de Babylone.
En retour, le Gaon envoyait ses émissaires, appelés Pegidim,
en direction des régions les plus éloignées du monde connu de l'époque dans
lequel des groupes de Juifs s'étaient installés. Un prosélytisme ardent continuait
d'animer tous ces exilés.
C'est ainsi que, depuis Babylone un gouvernement central
continuait de diriger d'une main de fer l'ensemble des communautés juives
dispersées dans le monde entier avec pour objectif principal d'empêcher
l'assimilation aux sociétés-hôtes en créant une multitude innombrable
d'obligations rituelles dans la vie quotidienne, qui contraignaient les Juifs à
vivre séparés de leur environnement humain et politique.
Un tel comportement suscitait l'hostilité des habitants des
pays-hôtes, lesquels s'offusquaient d'un comportement jugé méprisant à leur
égard.
"Partout ils voulaient rester Juifs, et partout ils
obtenaient des privilèges leur permettant de fonder un État dans l'État. À la
faveur de ces privilèges, de ces exemptions, de ces décharges d'impôts, ils se
trouvaient rapidement dans une situation meilleure que les citoyens mêmes des villes
dans lesquelles ils vivaient ; ils avaient plus de facilité à trafiquer et à
s'enrichir, et ainsi excitèrent-ils des jalousies et des haines." Bernard Lazare, L'Antisémitisme
"Ne pas se moquer, ne pas déplorer, ne pas détester mais
comprendre". Baruch Spinoza
*
Comme je l'ai signalé ci-dessus, le gouvernement juif en
exil se déplaça ensuite en Espagne, dans le sillage des conquêtes arabes et de
l'expansion de l'islam, puis en Pologne, où il s'installa en maître. Il a fini
par se fondre dans les rouages de l'administration et dans les associations et
les groupes de pression qui pullulent dans le Nouveau Monde. Là, sa puissance
financière a pu s'épanouir et lui a permis de soutenir efficacement le
nationalisme sioniste né à la fin du XIXe siècle, ainsi que la colonisation de
la Palestine. J'analyserai ces points dans les chapitres suivants.
Notes
[1] http://www.pagestov.com/index.php?page=search) (Plans du
site : Plan thématique | Plan géolocalisé Restaurants casher - Boucherie casher
- Coiffure juive - Medecin juif - mariage juif - Synagogue - Paris - Marseille
- Avocat / notaire - Ecoles - Vacances
[4] Cité par le quotidien Yediot Ahronoth du 21 mai 2012
[6] Article de Nurit Peled Elhanan, en mémoire de quatre
jeunes Palestiniens assassinés : Muhamad Awarta, Salekh Kwrick, Muhamad et
Usaid Kadus. l
Bibliographie
Professor Abdel-Wahab Elmessiri:
The
function of outsiders : http://weekly.ahram.org.eg/1999/435/op2.htm
The
kindness of strangers: http://weekly.ahram.org.eg/1999/436/op2.htm
A chosen
community, an exceptional burden : http://weekly.ahram.org.eg/1999/437/op5.htm
A people
like any other : http://weekly.ahram.org.eg/1999/438/op5.htm
Learning
about Zionism: http://weekly.ahram.org.eg/2000/476/eg6.htm
Mario Liverani, La Bible et l'invention de l'histoire, 2003,
trad. Ed. Bayard 2008
Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, La Bible
dévoilée. Les nouvelles révélations de l'archéologie, 2001 ,trad. Ed. Bayard 2002
Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, Les rois sacrés
de la Bible, trad.Ed.Bayard 2006
Arno J. Mayer, De leurs socs, ils ont forgé des glaives,
Histoire critique d'Israël, Fayard 2009
Ernest Renan, Histoire du peuple d'Israël, 5 tomes, Calmann-Lévy
1887
Bernard Lazare, L'Antisémitisme, son histoire et ses causes,
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Douglas Reed , La Controverse de Sion
Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé, Fayard
2008, coll. Champs Flammarion 2010
Avraham Burg, Vaincre Hitler : Pour un judaïsme plus
humaniste et universaliste , Fayard 200
Ralph Schoenman, L'histoire cachée du sionisme, Selio 1988
Israël Shahak, Le Racisme de l'Etat d'Israël , Guy Authier,
1975
Karl Marx, Sur la question juive
SUN TZU, L'art de la guerre
Claude Klein, La démocratie d'Israël,1997
Jacques Attali: Les Juifs, le monde et l'argent, Histoire
économique du peuple juif. Fayard, 2002
29 juin 2012
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