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dimanche 31 octobre 2010

Le secrétaire général du mouvement du Jihad islamique : "Israël" vit aujourd’hui une crise existentielle

Publié le 30 octore 2010 sur le site french.moqawana.org
Par French Moqawama

Commémorant la naissance du mouvement du Jihad islamique (23ème année) et le martyre de Fathi Shiqaqi (15ème), fondateur et secrétaire général du mouvement assassiné par le Mossad, le secrétaire général du mouvement du Jihad islamique, Ramadan Shallah, a adressé trois messages, l’un aux combattants du mouvement, l’autre aux masses de « notre peuple palestinien » et le troisième aux « masses de notre nation arabo-islamique ».

Dans le premier message, il a déclaré : « nous commémorons le martyre du fondateur du mouvement, dr. Fathi Shiqaqi, en tant que pensée, voie et projet que le martyr Shiqaqi a portés et pour lesquels il est tombé martyr. Lorsque nous commémorons la naissance du mouvement, c’est la naissance d’un parcours de combat qui est né des profondeurs de la blessure, de la souffrance et de la tragédie de notre peuple et de notre nation, la tragédie de la Palestine. Le choix de Shiqaqi était clair : l’islam est la doctrine, la loi et la méthode de la vie, et la Palestine, toute la Palestine, est le but de la libération, et le jihad et la résistance sont la voie de la libération.

Commémorer la naissance du mouvement signifie concrétiser l’appartenance réelle et rester fidèles à ces objectifs, dans notre pensée, notre travail, notre comportement, notre morale, et tout ce qui nous concerne. Tout cela, nous devons le mettre en pratique en toute modestie, que ce soit dans notre relation avec nous-mêmes ou dans notre relation avec les autres…
Dans tous les cas, nous nous rappelons que Shiqaqi fut un projet de martyre sur la voie de la victoire et de la libération. Shiqaqi n’était pas, comme vous le savez tous, celui qui réclamait la vie ici-bas, il ne recherchait ni poste ni pouvoir, ni rien de tout ce qui est passager dans cette vie.
Shiqaqi fut un pensée, une voie, une ligne politique distincte.. Il ne connaissait ni la trêve, ni les concessions, ni les flatteries, ni la ruse, ni la complaisance politique au détriment des principes et des constances, car bien qu’il ait été attentif à l’unité, avec une profonde conscience et une grande maturité, il n’avait pas foi dans les solutions à mi-chemin dans notre conflit avec l’ennemi sioniste…

Aujourd’hui nous disons : notre appartenance à Shiqaqi signifie l’appartenance à ses principes, à ses idées, à sa ligne, sa voie, ses positions et sa détermination.

Le second message
s’adresse à notre peuple palestinien, partout où il se trouve : il est devenu clair que le choix des négociations est arrivé à une impasse… Nous demandons en toute sincérité et responsabilité : pourquoi cette insistance de la part de la direction de l’Autorité palestinienne à ce choix. Indiquez nous un seul peuple dans l’histoire qui ait lancé face à son ennemi qui occupe sa terre le slogan « la seule alternative aux négociations ce sont les négociations » ! Indiquez-nous un seule peuple qui ait accepté de s’emprisonner soi-même, de se poursuivre soi-même, de se réprimer soi-même pour protéger et maintenir la sécurité de son ennemi qui occupe sa terre ! Cette absurdité doit cesser, car elle bafoue la dignité de la Palestine et de notre peuple. Sinon, nous percevons un complot énorme qui nous fait craindre ce qui peut découler de ces négociations entre l’Autorité et l’ennemi, la liquidation de la cause, l’achèvement du conflit et la reconnaissance finale et absolue du droit à l’existence de l’entité sioniste, comme une part naturelle de la région.

Nous avons vu et entendu les préliminaires de cela dans des déclarations suspectes qui font allusion à la possibilité de reconnaître la judaïté de l’Etat sioniste, prélude à l’expulsion de notre peuple dans les territoires de 48 et l’abandon de 5 millions de réfugiés en exil.. Aujourd’hui, nous tirons la sonnette d’alarme et mettons en garde contre une troisième nakba, conséquence de l’insistance sur la voie des négociations avec l’ennemi et sur le slogan qu’il n’y a aucune alternative aux négociations.

Pour affronter cette nakba prévisible, nous réclamons le retrait entier des négociations avec l’ennemi, la fin de la division de la scène palestinienne, l’unification autour de la lutte et de la résistance, oui, la résistance et le jihad pour affronter et faire échec à tous les plans de l’ennemi sioniste et les risques de son agression contre notre peuple, notamment dans la bande de Gaza.

Le troisième message s’adresse aux masses de notre nation arabo-islamique :
Nous nous adressons aux peuples car nous avons cessé de compter sur les gouvernements et les régimes qui ont abandonné la Palestine et toutes les questions vitales de la nation. Nous disons que la Palestine n’est pas la cause du seul peuple palestinien, et Israël n’est pas un danger sur la Palestine et son peuple seulement, mais le projet sioniste menace toute la nation…
Si quelqu’un pense qu’en tournant le dos à la Palestine et à al-Qods, il assurerait sa propre survie, il se fait des illusions. Si la Palestine est définitivement perdue et qu’"Israël"reste au cœur de la nation, personne ne pourra survivre au déluge du projet américano-sioniste pour la domination de la région et du monde. La partition actuelle, l’esprit local et le slogan « que chacun s’occupe de soi » ne sont pas la voie du salut, mais plutôt celui de la perdition, dans ce monde et dans l’autre.

Le projet de l’ennemi consiste aujourd’hui à diviser ce qui est partagé et à partager encore plus, à faire éclater et désintégrer la nation, en déclenchant les incendies et les séditions.. Regardez du côté de l’Irak et de l’Afghanistan, et ce qui se prépare pour le Liban, la Syrie et l’Iran… Regardez la grande catastrophe qui attend le Soudan avec la menace du détachement du sud du pays dont la superficie est 23 fois supérieure à celle de la Palestine, ce qui veut dire que c’est un nouveau "Israël" avec d’énormes capacités qui va naître en Afrique pour encercler les Arabes, et notamment l’Egypte.

Si l’entité sioniste parvient à échapper aux conséquences de son crime en Palestine et à vivre dans cette région, au cœur de la nation des arabes et des musulmans, il faudrait dire adieu à cette nation, car la présence de cette entité ne peut apporter aucune forme de paix, mais plutôt les guerres et la ruine. C’est pourquoi il faut que le mot d’ordre de tous les sincères, les croyants, les dignes de cette nation doit être la disparition d’"Israël". Cette entité vit aujourd’hui une crise existentielle, elle ressent le danger de sa disparition, et elle disparaîtra, par la volonté de Dieu.

URL de l'article: http://french.moqawama.org/essaydetails.php?eid=2268&cid=282

Le 7ème commandement: Le bien d’autrui tu ne prendras ni retiendras injustement.

Publié le 29 octobre 2010 sur le site mounadil.blogspot.com
par Mounadil al Djazaïri
Comme Gaza, la Cisjordanie est un des territoires qui devrait faire partie du futur Etat palestinien à l'issue de l'aboutissement de discussions de paix. La Cisjordanie est cependant, comme on le sait, soumise à une incessante pression coloniale que rien ne semble en mesure d'endiguer.
Et ce n'est pas simplement une question de couleur politique des dirigeants du gang sioniste puisque la colonisation n'a jamais cessé malgré les changements de majorité parlementaire.
Tout le monde a compris que les sionistes ont décidé d'en finir avec la chimère d'un Etat palestinien. Ce que les palestiniens pourront au mieux espérer, c'est un camp de concentration autogéré à Gaza et des bantoustans en Cisjordanie.
Dans cette dernière région, le compte à rebours a sans doute commencé pour l'Autorité Palestinienne, cette institution qui dirige fictivement des lambeaux de Cisjordanie.
Fictivement, car c'est bel et bien la souveraineté de l'entité sioniste qui s'exerce sur place et tous les plans de développement envisagés n'y changeront rien et sont dores et déjà voués à l'échec. Et ce n'est ni faute de talents, de bonne volonté ou de capitaux. C'est simplement que les autorités sionistes ne tolèreront pas l'édification de ce qui pourrait s'apparenter à une économie palestinienne, non étroitement dépendante de celle de l'Etat voyou. Seuls les dirigeants Palestiniens de l'équipe Abou Mazen semblent ne pas s'en rendre compte.

Un exemple de l'exercice de cette souveraineté sioniste sur la Cisjordanie nous est donné par le blog
Potins de Palestine qui observait:
Le 21 février [2010], le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a annoncé la décision d’inscrire la Tombe de Rachel (Bethléem) et le Tombeau des Patriarches (Mosquée d’Abraham à Hébron) au patrimoine ISRAELIEN…cette décision a été soutenue par son cabinet. Depuis d’autres sites situés dans les TERRITOIRES PALESTINIENS vont être ajoutés : Tel Rumeida (dont les datations remontent jusqu’au Bronze ancien, et au Bronze moyen une Cité-Etat CANANEENE), Sussiya (sud d’Hébron), Qumran (site des manuscrits de la mer morte), Hérodion, Palais de David (Silwan, Jérusalem est).
C’est une nouvelle provocation envers les Palestiniens et de nouveau (encore et toujours) une atteinte au droit international : Convention de la Haye de 1954 et des Conventions de Genève. Ils ne connaissent plus de limites.
Potins de Palestine s'insurge à raison contre cette infraction supplémentaire au droit international. Mais quand on est capable de tuer - et d'en être fier - 9 humanitaires désarmés, c'est bien le signe qu'on n'a plus de limites. Et cette sauvagerie débridée n'est en rien un phénomène récent.

Forts de leur bon droit, les Palestiniens ont protesté auprès de l'UNESCO, l'organisme onusien chargé du patrimoine culturel.
Et
l'UNESCO a joué son rôle en demandant aux autorités sionistes de retirer le Caveau des Patriarches et la Tombe de Rachel de l'inventaire du patrimoine de l'entité sioniste.
Vous imaginez bien que l'entité sioniste va obtempérer!

En fait, Benjamin Netanyahou, le chef actuel du gang
a réagi de manière prévisible:
Lundi, le premier ministre Benjamin Netanyahou a vivement critiqué la décision de l'UNESCO, l'organisation mondiale de la culture, de présenter le site de la tombe de Rachel comme une mosquée musulmane.
"Cette volonté de séparer la nation d'Israël de son patrimoine culturel est absurde," a déclaré le premier ministre.
Oui, parce qu'un bruit court chez les sionistes qu'il n'y a pas de moquée à l'emplacement de la tombe de Rachel à Bethléem ou que cette mosquée a été édifiée et baptisée récemment pour "islamiser" le terrain en quelque sorte.
C'est faux, bien entendu, comme la plupart des assertions sionistes. Mais à force de répéter leurs menteries en boucle, ils y croient à défaut de convaincre les autres, et l'UNESCO en particulier.

Le bref aperçu historique que je vous propose ci-après nous aide au minimum à comprendre comment a été récompensée la tolérance des autorités ottomanes et des Palestiniens Musulmans ou Chrétiens
La tombe de Rachel, qui se trouve dans la partie nord de Bethléem ets considéré comme un lieu sacré de pèlerinage pour les Chrétiens, les Musulmans ainsi que les Juifs. Rachel, l'épouse de Jacob mourut en couches alors qu'elle se rendait à Hébron et fut enterrée sur la route de Bethléem. La tombe fut négligée pendant des années avant d'être restaurée par les Croisés. Elle était constitué d'un bâtiment cubique de 7m2, reposant sur quatre colonnes liées par des arcs brisés de 3,5 m de large pour 6,5 m de haut, le tout étant surmonté d'une coupole (description d'Amico en 1596). La bâtiment simple qui accueille la "tombe aujourd'hui" a été édifié par les Turcs en 1620 pendant la période ottomane et, les Musulmans la considérant comme sacrée pour sa relation avec Abraham en conservèrent les clefs. En 1841, Sir Moses Montefiore demanda au gouverneur Turc les clefs de la Qubbet Rahil ou mosquée Bilal Ibn Rabah, comme elle est nommé en arabe, qui furent données aux Juifs indigènes. Un vestibule carré avec un mirhab avait également été ajouté pour les Musulmans; on trouve aussi un cimetière musulman historique à l'ouest de ce sanctuaire. La tombe de Rachel est considérée comme un des monuments historiques de la cité de Bethléem et comme une partie de son patrimoine. De plus, les habitants de Bethléem et des touristes du monde entier de diverses religions ont toujours visité la tombe. Depuis deux ans; les forces d'occupation israéliennes empêchent les Musulmans et les Chrétiens de se rendre sur les lieux, niant le droit de culte des Palestiniens, refusant aux Musulmans le droit d'enterrer librement leurs morts dans le cimetière voisin et restreignant l'accès du sanctuaire aux Juifs dans une démarche préliminaire à l'annexion de et endroit à la ville de Jérusalem.
Hébron et Bethléem font notoirement partie de territoires dont personne ne considère qu'ils relèvent de la souveraineté "nationale" de l'Etat pseudo-juif mais plutôt de celle de l'Etat palestinien à venir.
Ce qui n'empêche pas
un site (sioniste) voué à la désinformation d'écrire ce qui suit:
Nous devrions revendiquer la Mecque, ou une partie puisqu'il parait qu'Abraham (Ibrahim) est venu y sacrifier son fils Ismaël.
Or, la question n'est pas de dire si les lieux considérés ont ou n'ont pas d'intérêt pour les gens de confession juive, mais de dire si les délinquants sionistes ont le droit de déclarer patrimoine national des édifices qui se trouvent en dehors du ressort de leur Etat dit juif.

Car, si on prend au sérieux leurs crétineries, les sionistes vont peut être inscrira à leur patrimoine "national" la synagogue de Cavaillon, une des deux plus anciennes de France? Après tout, Cavaillon n'est pas plus dans le territoire de l'entité sioniste que ne le sont Hébron ou Bethléem. La France considère cette synagogue comme partie de son patrimoine et l'a classée Monument Historique. A-t-elle tort?
J'attends les protestations des délinquants sionistes.

URL de l'article: http://mounadil.blogspot.com/

Netanyahu en colère contre l'UNESCO

Publié le 30 octobre 2010 sur le site PNN

La décision a énervé Netanyahou et ses semblables est un doux euphémisme! Tous les sites sionistes sans exception sont monter salement au créneau pour taper violemment sur ces institutions onusiennes décidément quasi antisémites!!!

PNN - Suite à une proposition de pays arabes membres de l'ONU, l'UNESCO a décidé de définir comme palestiniens plusieurs sites religieux, considérés comme sacrés aussi bien par les juifs que les musulmans.

La décision a énervé le premier ministre israélien qui la qualifiée "d'absurde". Dans un communiqué publié par le cabinet de M. Netanyahu, celui-ci condamne la décision prise par l'UNESCO la semaine précédente, déclarant "la tentative de détacher le peuple d'Israël de son héritage est absurde. Si le lieux où sont enterrés Abraham, Isaac, Jacob, Sarah, Leah et Rachel, depuis près de 4000 ans n'est pas partie intégrante de l'héritage juif, alors qu'est ce qu'il est?"

Netanyahu fait référence a un des sites défini comme palestinien par l'UNESCO, le tombeau des patriarches pour les juifs, ou la mosquée d'Ibrahim par les musulmans. Situé dans la ville palestinienne, le tombeau est censé abrité les corps des patriarches Abraham, Isaac et Jacob, ainsi que leur femme. Le lieu est considéré comme sacré et hautement symbolique pour les deux religions, car Abraham est aussi bien le fondateur du judaïsme que de l'islam. A Hébron, quelques 500 colons vivant au milieu de plus de 150.000 palestiniens sèment la terreur dans la ville, attaquant régulièrement les palestiniens, tout en jouissant de la protection accordé par l'armée israélienne.

La tombe de Rachel, ou la mosquée de Rafah pour les musulmans, située à Bethléem, fait également partie des sites que l'UNESCO a qualifié de "palestiniens" lors de sa dernière réunion. L'UNESCO a affirmé que, en tant que "partie intégrante des territoires occupés palestiniens, toute mesure unilatérale prise par Israël sera considérée comme une violation du droit international."Netanyahu a déclaré regretté le caractère politique que l'UNESCO donnait ainsi à ces sites religieux, ajoutant que "seul Israël, contrairement à ses voisins, garantissait la liberté de culte et préservait les sites religieux pour les générations futures."
Sur la question pourtant brulante des excavations archéologiques entreprises sous la mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, menaçant de faire s'effondrer l'édifice, l'UNESCO a seulement déclaré se sentir "profondément concerné", mais aucune résolution n'a été voté ou proposé.

URL de l'article: http://french.pnn.ps/index.php?option=com_content&task=view&id=5166

Réflexions sur les concepts de civilisation et de décadence

Publié le 31 octobre 2010 sur le site pagesperso-orange.fr
par Manuel de Diéguez

On sait que les Etats-Unis ont décidé de renforcer leur chapeautage militaire de l'Europe , donc la tutelle politique masquée par le glaive qu'ils exercent sur le Vieux Monde depuis 1945. Mme Merkel a accueilli avec "
enthousiasme" ce renforcement de la férule de l'étranger sur son pays et sur l'Union européenne. Comment traiter du thème de la décadence des civilisations si vingt-sept nations démocratiques dont la population s'élève à un demi milliard de citoyens et de citoyennes acceptent passivement de placer à leur tête une classe politique tellement ignorante qu'elle ne semble pas porter un regard d'adulte sur l'histoire et la politique?

Mais l'ignorance est la compagne de la stupidité. Du coup, la vraie question est celle de peser le degré de maturité des peuples démocratiques d'un continent fondé sur les principes de 1789. Car la grande majorité des Français de 1940 désapprouvaient la politique de Laval, tandis que les majorités populaires d'aujourd'hui approuvent massivement l'extension guerrière continue de Washington sur le territoire de leur pays depuis 1949. Il existe plus de cinq cents garnisons américaines en Europe et elles s'étendent d'année en année, notamment en Italie.

Si un suffrage universel informé par l'éducation nationale avait le devoir d'armer l'opinion citoyenne d'un regard éclairé sur la scène internationale, aucun gouvernement démocratique ne serait autorisé à valider la progression militaire de l'OTAN sur les terres de la nation, parce que la masse des citoyens aurait appris sur les bancs de l'école qu'un gouvernement issu de l'instruction obligatoire n'est pas légitimé à placer la nation sous le sceptre d'un maître étranger en temps de paix.

Les enfants qui ont été laissé dans l'ignorance et qui siègent maintenant sur les bancs des parlements européens n'ont pas appris qu'ils ne sont pas davantage qualifiés pour aliéner la souveraineté nationale que la chambre des députés de la IIIe République d'abolir le régime démocratique et de remettre les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain. Mais en vertu du principe selon lequel nul n'est censé ignorer la loi, il est charitable de rappeler aux représentants des peuples qu'ils sont passibles de la Haute cour de justice et qu'ils ne pourront rejeter la responsabilité de leur illettrisme politique sur leurs instituteurs.

Dans ce contexte, la notion de décadence doit être traitée dans la perspective d'un approfondissement anthropologique de la question, donc à la lumière d'une réflexion sur l'évolution de l'encéphale de l'humanité. L'unité d'une méditation généalogique et psychanalytique de ce type se trouvera fatalement masquée au premier abord par le cours sinueux que prendra nécessairement un sujet appelé à se ramifier sur des territoires nombreux et diversifiés. C'est pourquoi je propose au lecteur un mode d'emploi destiné à le préserver du danger de courir sur des chemins de traverse.

1 - Les civilisations commencent par les armes et la pierre ; elles ne courent vers les sciences, les Lettres , les arts et la pensée philosophique que dans un second temps.

2 - La réflexion anthropologique sur la politique répond à une ambition tardive de la raison, celle de capturer la notion de décadence et de la situer dans un champ de vision panoptique de l'histoire tumultueuse de l'encéphale du simianthrope.

3 - L'étude du déclin d'une civilisation polymorphe porte principalement sur les relations de plus en plus tendues qu'une humanité cérébralisée entretient avec les mythologies religieuses des ancêtres et avec les fondements mythiques que le sacré voudrait imposer à l'éthique devenue rationnelle des modernes.

4 - Quand la réflexion sur la morale s'est révélée consubstantielle à la connaissance de l'évolution de l'encéphale du singe parlant, une interprétation anthropologique des progrès de la civilisation permet de tenter de conjurer leur chute.

5 - Dans ces conditions, pourquoi une civilisation aussi technicienne et lettrée que celle de Byzance s'est-elle subitement effondrée sous les coups d'un mythe du salut? Parce que l'éthique politique est tellement la colonne vertébrale de l'histoire que c'est l'immoralité de la classe dirigeante de cette civilisation raffinée qui l'a conduite à la ruine. De même, il faut attribuer à l'immoralité de la république romaine finissante, puis des Tibère, des Claude, des Néron, des Caligula, des Othon, des Vitellius l'effondrement de l'empire des Césars.

6 - Quels sont les liens que l'éthique politique entretient avec les sciences, les Lettres et les arts d'un côté et avec les guerriers de l'autre ? Ici encore, seule une réflexion interprétative de l'évolution de la boîte osseuse de notre espèce peut nous fournir la clé anthropologique du problème, parce que la pensée normative est toujours parallèle aux progrès de l'intelligence et des savoirs. S'interroger sur l'itinéraire qui a guidé parallèlement la raison et les règles de conduite des cités, c'est rappeler que l'histoire des neurones du sacré est entièrement à réécrire.

7 - Il faut attendre que la raison critique ait suffisamment progressé dans la connaissance anthropologique de l'animalité cérébrale des idoles, puis de l'animalité de la politique des trois dieux uniques d'aujourd'hui pour que les notions de civilisation et de décadence se placent dans le cadre d'une réflexion sur l'avenir de l'intelligence de notre espèce. Alors seulement l'histoire du monde pourra reprendre son cours ascensionnel, parce que les progrès du "Connais-toi" accompagneront de nouveau la marche des sciences et des techniques - processus vital et que la chute de Byzance, puis de Rome avait précisément brisé.

Ce bref canevas permettra au lecteur de s'y retrouver dans les lacis apparents d'une démarche qu'il fallait jalonner de quelques avertisseurs.

*

1 - Comment franchir le pont entre l'action et la pensée ?
2 - Comment se colleter avec l'encéphale de Jupiter ?
3 - Le monde, la foi et le politique
4 - L'exemple romain
5 - Les premières fissures de la politique du ciel
6 - Les dieux et la politique
7 - La psychophysiologie des dieux
8 - Dégrossir l'idole
9 - La postérité commune de Darwin et de Freud
10 - Un exemple
1 - Comment franchir le pont entre l'action et la pensée ?

Toutes les grandes civilisations ont scellé des alliances durables ou transitoires entre les prouesses de leurs armes et les exploits de leurs écrivains, de leurs artistes et de leurs philosophes. Certes, les performances des mécaniciens, des bâtisseurs et des guerriers précédent ceux de l'écriture et de la pensée. Aussi, de grands peuples sont-ils longtemps demeurés étrangers au regard de haut que la raison tente de porter sur le genre humain. L'Egypte a produit des géomètres, des astronomes, des architectes, des physiciens, des chimistes et des sculpteurs, mais la littérature et le théâtre sont restés inconnus à son génie, parce qu'il aurait fallu intercaler un public lettré entre la cour et les fellahs. Quant à la Macédoine, elle a côtoyé Athènes sans débarquer ni dans une logique universelle, ni dans les rigoureux enchaînements de concepts inaugurés par la dialectique démonstrative de Platon: si Alexandre avait trouvé un Aristote à la cour de son père, la face du monde en aurait été changée.

Le basculement des civilisations du glaive dans celles des métamorphoses de la conversation en littérature et des savoirs pratiques en raisonnements reliés entre eux par les chaînes de la logique se révèle artificiel ou fortuit: on suit à la trace la patiente initiation des guerriers et des juristes romains au vocabulaire de l'éloquence raisonnée et de la métaphysique des Grecs. Mais le pacte multi millénaire que le tranchant des épées conclut avec les récoltes de la réflexion pure ont connu une interruption mémorable avec la ruine brutale de la civilisation byzantine, dont les mathématiques et les inventions mécaniques étaient prodigieuses pour l'époque. Comment cet édifice a-t-il pu s'écrouler subitement sur lui-même, comment le sceptre de la théologie chrétienne a-t-il pu s'emparer en quelques années du monopole d'une réfutation délirante de tant de victoires de la raison des Grecs, comment les intelligences qui paraissaient les mieux aguerries ont-elles pu se laisser guider par les soucis tout subjectifs d'une orthodoxie convulsive? Plus de pensée affûtée, plus d'essor sacrilège de la raison critique, plus d'imagination libérée du joug des rêves sacrés, plus de philosophie iconoclaste, plus d'école des blasphèmes. La cloche des profanations avait cessé de sonner; et pourtant le clergé nouveau n'était ni indigne, ni ignare. Que lui est-il donc arrivé? Pourquoi le courage des grands solitaires - le génie est érémitique par définition - s'est-il trouvé pris en étau entre la peur et l'extase? Il y a fallu des circonstances politiques qui ont disqualifié l'individualisme.

2 - Comment se colleter avec l'encéphale de Jupiter ?

Du seul fait que les croyances sacrées se fondent sur la soumission à des dieux, elles poussent sur le terreau du mépris des intelligences solitaires. Alors, les vicaires de la parole d'une divinité collective ont envahi la place; et tout grand esprit s'est vu contraint de se mettre au service de l'idole. La foi interdit aux croyants de subordonner l'encéphale de Jupiter à celui de ses théoriciens. Le dieu est censé mieux savoir, il passe pour plus intelligent que son inventeur. Aussi la tyrannie que les mythes sacrés exercent sur les esprits d'élection peut-elle s'épanouir dans la cour d'école des querelles sur la nature et les visées d'un souverain fantastique du cosmos. L'enterrement de l'hellénisme pensant dans un enclos étroit révèle que si les premières civilisations reposent sur le tranchant des glaives et sur les bâtisseurs de murailles, les victoires des sciences et des techniques se trouvent ensuite englouties dans le sillage sanglant d'une divinité dont tout le monde salue les exploits de sa boîte osseuse.

Comment se fait-il que ce genre de triomphe de la folie et de la candeur conjointes prenne l'allure répétitive des rites et des liturgies? C'est que la raison est l'ennemie du désir et le désir a la peau dure. Au milieu du siècle dernier encore, les trois quarts de l'intelligentsia désirante mondiale n'ont-ils pas proclamé qu'un substitut planétaire du salut religieux était devenu "indépassable"? La délivrance imminente et planifiée du genre humain n'a-t-elle pas été de nouveau annoncée? Ce sauvetage n'était-il pas appelé à se produire à la suite de l'irruption soudaine et irrésistible d'un deus ex machina sartrien? Un "processus historique" invincible n'avait-il pas été programmé par un clergé de logiciens de l'eschatologie et de la sotériologie marxistes ? Comment se fait-il qu'une logique aussi impavide que celle de l'auteur du Capital soit devenue le four à pain d'une mystique de l'espérance, donc d'une sotériologie, sinon parce que l'esprit de géométrie préfigure les planifications prophétiques et eschatologique du destin?

3 - Le monde, la foi et le politique

Qu'en est-il de la nature d'un agenouillement universel et instantané de l'humanité devant une rédemption rigoureusement programmée? Ce délire stupéfie une anthropologie critique peu encline à se laisser entraîner dans les solennités liturgiques qui accompagnent les funérailles de la raison adulte. Cette question devient plus pressante encore quand la souveraineté soudaine des sciences et des techniques éteint les feux des méditants et des contemplatifs. La ruine de l'ingénierie géante des civilisations seulement ingénieuses ferait-elle, de leur refuge précipité dans l'apologie d'une rédemption béatifiante une simple étape de leur descente inexorable au tombeau? La débilitation foudroyante des cerveaux et des âmes épuisés par les victoires du fer sur les champs de bataille servirait-elle de relais anémié, puis de boomerang au déclenchement des décadences byzantines?

Dans ce cas, il deviendrait heuristique de se demander en tout premier lieu ce qui a bien pu se passer au sein de la civilisation occidentale pour qu'un essor technologique et scientifique prématuré ait conduit des mécaniciens bien trempés et des calculateurs minutieux à l'enfermement de l'humanité dans un rêve d'enfant - celui de transporter le simianthrope dans l'Eden d'une délivrance précédée de vingt siècles de sautillements désespérés sur la terre et que symbolisera le "dernier homme" de Nietzsche.

4 - L'exemple romain

A l'appui de ce "syllogisme de l'amertume", comme dirait E.M. Cioran, est-il une civilisation de la persévérance plus titanesque dans le génie de la pierre et du fer que la romaine? Sous Claude, un aqueduc tour à tour aérien et souterrain de plus de soixante kilomètres, commencé sous Caligula, apporte l'eau de trois lacs lointains aux centaines de fontaines de la ville. Vu l'outillage de l'époque, ce treizième travail d'Hercule ne serait égalé de nos jours que par une tuyauterie géante qui conduirait le Rhône de Genève à Paris. Le génie romain a couvert l'empire de routes de granit et d'amphithéâtres titanesques. Quand un empereur refusait qu'on construisît des temples massifs en son honneur, il se voyait accuser de mépriser la cité : "Les mortels les plus illustres aspirèrent toujours aux plus hautes récompenses (…) Le mépris de la gloire n'est que le mépris de la vertu. " (Tacite, Annales, L. IV, chap.38)

Mais pourquoi les premiers contempteurs des grandeurs mécaniques s'étaient-ils déjà insinués dans le secret des consciences ? Agrippine, la veuve colérique, mais vaillante de Germanicus, l'illustre vengeur des légions massacrées de Varus, vient se plaindre à Tibère des pièges que lui tend Séjean, l'âme damnée de l'empire, qui s'apprête, dit-elle, à ruiner son crédit par une accusation infondée de crime de lèse-majesté à l'encontre de ses amies Pulchra et Sosia. Elle trouve l'empereur occupé à offrir un sacrifice à Auguste, leur "père à tous": "On ne devrait pas, s'écrie-t-elle, immoler des victimes au divin Auguste quand on persécute ses descendants. L'âme de ce dieu n'est pas entrée dans le marbre inanimé, mais en elle-même. La seule effigie céleste est née de son sang." (Annales, L. IV, chap.52)

5 - Les premières fissures de la politique du ciel

On comprend que la chute des âmes d'acier dans le sordide ait donné tout son poids au mépris des chrétiens pour la mollesse des gloires putréfactrices. Pendant des siècles, des centaines de milliers d'hommes et de femmes chercheront auprès d'un roi spartiate du cosmos une vie plus digne d'être vécue à leurs yeux que dans la pourriture d'un empire agonisant. Le christianisme s'est coulé dans le lit du stoïcisme et le stoïcisme n'est que la suite logique du socratisme. Qu'on lise la mort de Sénèque, de Thraséa et d'autres héros de la spiritualité et du courage philosophiques et l'on comprendra que l'éthique est l'âme et le cerveau des civilisations vivantes.

C'est pourquoi, au IIIe siècle encore, saint Ambroise croira que le nouveau Jupiter protégerait l'empire non seulement de la honte des turpitudes romaines, mais avec bien plus de succès militaires que les dieux mourants de l'Olympe. A la suite du sac de Rome en 410, saint Augustin consacrera vingt ans de sueurs et de larmes au labeur cosmologique de démontrer à l'Eglise et à la masse des chrétiens raidis dans leur piété de stoïciens que le naufrage d'une civilisation sous les coups des barbares répondait aux volontés d'un dieu aux desseins intelligents, mais impénétrables et aux brutalités seulement passagères. La Cité de Dieu est le premier traité systématique de légitimation divine des catastrophes culturelles, la première justification théologique des décadences et la première sanctification de la sottise politique au cœur du mythe des Titans du salut et de la grâce. Depuis lors, la piété jette sur sa propre cécité le manteau d'une rédemption herculéenne. Avec Allah, un culte de la fatalité enfermera à son tour les dérobades de la raison dans la châsse de l'obéissance dévote et de la fainéantise militaire.

Aussi l'ascension ad astra de la religion chrétienne n'est-elle pas due seulement à la vanité dont toutes les entreprises terrestres se trouveront frappées: il s'y ajoutera un complexe de culpabilité gigantesque et une nostalgie douloureuse des consciences romaines abatardies. Cette gangrène rongera de l'intérieur tout le premier siècle de notre ère, tellement les lettrés voyaient dans le naufrage continu de la morale rationnelle, tant publique que privée, la cause première et la plus criante de l'effondrement lent et inexorable de la République. Mais l'invocation d'une prétendue programmation céleste du déclin du peuple des Quirites sous la houlette du Dieu nouveau des chrétiens servait déjà d'alibi et de faux-fuyant aux intelligences, tellement la cruauté du vrai diagnostic crevait par trop les yeux pour ne pas faire reculer d'effroi tout le monde et provoquer une fuite éperdue des responsabilitéd dans un alibi religieux monumental.

6 - Les dieux et la politique

Certes, pendant plus de dix-sept siècles, la religion de la croix assortira son mépris pour les sciences, les lettres et les arts d'une pédagogie de la dévotion farouchement fondée à la fois sur la sacralisation de l'ascèse des stoïciens et sur la proclamation compensatoire de la suprématie de la théologie sur la philosophie. La sanctification naïve d'un pouvoir central des Etats et des nations désormais surveillés et gérés d'en-haut par le nouveau Jupiter forgera un rituel de la piété dont le sacre des rois de France illustrera l'argumentation candide et généreuse. On associera l'installation évangélique des successeurs de Jésus-Christ sur le trône de la Gaule à l'énoncé de la profession de foi la plus solennelle . Les formules liturgiques liaient l'exercice d'un pouvoir temporel sanctificateur aux devoirs universels de la morale et de la charité évangéliques: "Que le roi châtie les orgueilleux, qu'il serve de modèle aux riches et aux puissants, que sa bonté pour les humbles et sa charité pour les pauvres le montrent juste à l'égard de tous ses sujets et qu'il œuvre à la paix entre les nations."

Les Romains ne demandaient pas encore aux dieux leur soutien inébranlable à la consolidation des devoirs moraux de l'Etat profane, mais seulement de leur accorder des faveurs chiffrables en échange de leur observance méticuleuse des rites cultuels. Il fallait que l'Olympe fût un débiteur nanti pour qu'on pût lui demander de nous aider à remporter des succès sur le terrain. Nous avons oublié la débâcle de l'éthique politique à laquelle cette théologie de grippe-sous et de porte-sabres a conduit l'empire. Tacite: "Je me rends bien compte qu'il doit paraître fabuleux (fabulosum) (…) qu'un consul désigné se soit uni maritalement avec la femme de l'empereur et cela à un jour fixé, en présence de témoins conviés à signer le contrat conjugal, comme s'il s'agissait de fonder une famille, fabuleux que cette femme eût écouté les paroles rituelles des haruspices, se soit couverte du voile nuptial, sacrifié aux dieux, pris place à table entourée de convives, fabuleux qu'elle se fût livrée aux baisers, aux enlacements et enfin à la coucherie matrimoniale. Mais je n'ai rien rédigé en vue de provoquer la stupéfaction (miraculosa), je n'ai fait que rapporter ce que des vieillards m'ont raconté ou que j'ai lu dans les écrits de l'époque." Tacite, Annales, L. XI, chap. 27.

Suétone ajoute un trait saisissant à ce tableau: "Ce qui dépasse l'imagination, c'est qu'on fit signer à Claude le contrat de mariage de sa femme avec Silius, son amant, en lui faisant croire qu'il s'agissait d'un jeu pour détourner quelque mauvais présage." En ce temps-là, les dieux n'étaient encore que des acteurs de la politique et des stratèges à consulter, non des gardiens idylliques de la morale privée.

7 - La psychophysiologie des dieux

L'anthropologie critique se demande pourquoi les civilisations pourrissantes perdent la robustesse de leurs élévations au point que la ruine des sciences et des techniques, puis la liquéfaction des Lettres, des arts et de la pensée philosophique place sous les mitres et les crosses la désespérance des empires trompés par les triomphes passagers du temporel. C'est que la chute de Rome a provoqué un déplacement de l'essor intellectuel et de la musculature morale du monde antique en direction d'une quête entièrement nouvelle et pathétique: on allait décrypter les secrets psychologiques et politiques du nouvel empereur du ciel et de la terre, qui venait de réaliser l' exploit inouï d'arracher les rênes de l'univers des mains fatiguées de tous ses rivaux de l'Olympe. Cette interrogation angoissée, mais jugée exaltante, s'est poursuivie depuis Tibère jusqu'aux théologiens du Moyen Age. Sénèque se posera déjà les mêmes questions que Pascal et les jansénistes de Port Royal concernant la nature et les conditions rationnelles, mais irrationnelles d'apparence, des grâces prévisibles et imprévisibles dont un souverain omniscient et omnipotent de l'univers disposait à profusion.

"Oui, écrit le futur martyr de Néron, je rends grâces à une nature dont je pénètre les plus secrets mystères. Mais je ne me contente pas de m'enquérir des éléments qui composent l'univers, je me demande en outre quel en est l'architecte ou le conservateur." Puis venait un enchaînement d'énigmes théologiques qui ont longtemps fait croire que Sénèque était chrétien, ce qu'Erasme n'a pu réfuter qu'avec de grandes difficultés. On voulait savoir "ce que c'est que Dieu. Est-il absorbé dans la contemplation de lui-même? Abaisse-t-il parfois son regard sur nous? Crée-t-il tous les jours ou n'a-t-il créé qu'une fois? Fait-il partie du monde au point de se confondre à sa création? Peut-il promulguer de nouveaux décrets afin de modifier les lois du monde? Ne serait-ce pas perdre de sa majesté et s'avouer faillible au point d'avoir à retoucher son œuvre? Car celui qui ne saurait aimer que la perfection doit se montrer fidèle à ses amours ; non point qu'il se rendrait moins libre et moins puissant pour si peu, car il est lui-même la nécessité. Si l'accès à ces mystères m' était interdit, aurait-il valu la peine de naître?" (Sénèque, Questions naturelles, L. 1, Préface)

Comment la traque d'un démiurge aussi souverain que parfait favoriserait-il la construction des aqueducs ou l'organisation des jeux de gladiateurs dont Cicéron félicitait encore si vivement son ami Atticus? Mais comment ne pas installer dans les nues un contrepoids crédible des dieux de Néron? Chaque fois que le monstre avait perpétré un crime, on remerciait les dieux de l'avoir protégé d'un terrible danger - il devait à leur protection d'avoir assassiné à temps son frère Britannicus, sa mère Agrippine, sa femme Octavie.

8 - Dégrossir l'idole

On sait que la passion de découvrir les intentions bienveillantes ou redoutables de l'immensité, de l'éternité et du vide à l'égard de l'encéphale effaré de l'humanité - donc de percer les derniers secrets des civilisations - s'est ensuite consacrée à passer au crible les promesses fallacieuses d'une délivrance aussi sainte que définitive d'une espèce tour à tour ascensionnelle et dépressive. Assurément, c'était aux métamorphoses récentes du ciel et de ses grâces qu'il fallait attribuer une manne de prodiges béatifiques. On sait également que la Renaissance ne doutera pas le moins du monde de la véracité des récits fabuleux censés avoir été dictés par un créateur du cosmos à ses quatre évangélistes préférés. Mais pourquoi avait-il commis l'imprudence de laisser son Eglise faire le tri des calames crédibles? L'exégèse renacentiste ne faisait jamais, disait-elle, que délivrer plus sûrement qu'autrefois le joyau universel des écrits divins de la gangue dans laquelle des copistes ignorants l'avaient enchâssé.

Depuis des siècles, ce mode de traque de la vérité religieuse était d'usage courant non seulement au sein du polythéisme des philologues , mais au cœur d'une connaissance des textes sacrés qu'on qualifiait maintenant de "rationnelle". Si les astrologues s'étaient partiellement trompés dans leurs raisonnements impeccables concernant la durée exacte du séjour de Tibère à Capri, ce n'était nullement la faute de la science des relations des astres avec nos squelettes, mais exclusivement la leur. Pour Tacite lui-même "l'avenir de chacun est fixé dès la première heure de son existence et si les évènements démentent quelquefois les prédictions, cela tient à l'imposture du devin qui a annoncé ce qu'il a feint de savoir; et c'est pour cela qu'on a discrédité un art dont la validité a été démontrée dans les temps anciens, comme dans notre siècle par des preuves éclatantes." (Tacite, Annales, L. IV, chap. 22)

La conviction de ce que les voies du destin sont connaissables a passé des astrologues aux théologiens chrétiens. Aussi a-t-il fallu attendre les XVIIe et XVIIIe siècles pour commencer de mettre en accusation la morale et la politique d'un Dieu demeuré fruste et barbare en coulisse. Mais on n'osait encore accuser de sauvagerie le génocidaire du Déluge - aujourd'hui encore la férocité de ses tortures infernales alimente la sainteté de sa justice.

On voit qu'une civilisation ne se montre cérébralement vivante qu'aussi longtemps qu'elle demeure en guerre sur deux champs de bataille parallèles, celui de l'intelligence critique d'une humanité résolument prospective et celui de la raison non moins décapante des prophètes, dont on attribuera la provenance à une divinité en évolution dans le cosmos. Ces deux guerres, aussi iconoclastes l'une que l'autre, sont tenues pour conjointes quand la foi s'attache un instant à désaveugler la divinité. Aussi l'idole n'est-elle jamais qu'une pierre de touche révélatrice du degré de vaillance cérébrale du simianthrope et de ses porte-voix attitrés. Les décadences surviennent à l'heure entre chien et loup où les boîtes osseuses supérieures se découragent de porter un regard de pédagogues et de profanateurs tant sur elles-mêmes que sur les dieux ou le Dieu que les ancêtres ont sécrétés. Mais pourquoi l'homme se donne-t-il la réplique par l'intermédiaire de médiateurs imaginaires de son encéphale? Pourquoi notre espèce s'assoupit-elle dans l'oubli fécond et maladroit de ce compagnonnage? Peut-être n'est-ce pas le contenu scientifique des têtes qui donne leur élan aux civilisations, mais le souffle et l'élan des interlocuteurs du "ciel" et de l'intelligence humaine étroitement emmêlés.

9 - La postérité commune de Darwin et de Freud

Pour tenter de l'apprendre, demandons-nous quel ressort s'est brisé au cœur de la civilisation mondiale à partir du XXe siècle. Car le XIXe siècle a découvert l'évolutionnisme et le XXe siècle a commencé d'explorer quelques secrets de la conscience faussement lucide. Qu'en est-il des ténèbres de l'inconscient dans lequel le simianthrope cache ses effarouchements religieux? Comment se fait-il que deux découvertes plus gigantesques, semblait-il, que celle de l'héliocentrisme n'aient pas débarqué sur la place publique avec davantage de fracas que les querelles sur la grâce au XVIe siècle?

Certes, Darwin a déclenché un séisme dans les souterrains d'une théologie qui s'attachera pendant près de deux siècles encore à soutenir un géocentrisme sacralisé par son inscription dans l'astrologie, dans les saintes Ecritures du judaïsme et au cœur des astronomies primitives. Quant à la psychanalyse, on peut remarquer qu'elle a fait son chemin avec moins de tapage que l'évolutionnisme, mais qu'elle a ruiné la psychologie rudimentaire que le Moyen Age avait fait culminer dans un classement pétrifié des "facultés". Et pourtant, ni l'une, ni l'autre de ces sciences n'a provoqué une révolution radicale et universelle au sein de la pseudo-connaissance de lui-même que le simianthrope avait cru conquérir depuis la plus haute antiquité. Certes, la réflexion sur l'ascendance animale de notre espèce a ensuite progressivement glissé vers quelques analyses superficielles de la structure politique qui régit les comportements collectifs des hordes de chimpanzés; mais les résultats de ces premières recherches, quoique déjà frappants, n'ont pas été vulgarisés, sans doute parce qu'ils demeuraient trop élémentaires pour provoquer une mutation des aises de l'intelligentsia mondiale.

10 - Un exemple

Un seul exemple: chez les chimpanzés, à chaque naissance le chef de la horde vient saluer la mère et admirer le nouveau-né. L'atmosphère est joyeuse. Il est évident que s'il n'existait pas de conscience festive du groupe, donc d'identité propre au corps collectif, cette espèce ne se serait pas objectivée à ses propres yeux au point de se percevoir au spectacle d'évènements visibles sur un écran mental, celui du social. Aussi s'agit-il d'intégrer le nouveau-né dans le groupe, ce qui passe par l'éveil du môme à un regard sur sa mère et de celle-ci sur son rejeton. L'accouchée s'y attache pendant plusieurs jours au point de refuser toute tentative prématurée et faussement euphorique d'un contact affectif illusoire et unilatéral du mâle dominant avec sa progéniture encore étrangère à tout sentiment d'appartenance à la collectivité.

Si la mère, puis le chef, puis la tribu tout entière deviennent des personnages réels dans l'encéphale encore brumeux du chimpanzé au biberon, on comprend que la montagne, la forêt, les rivières, sortiront du néant à leur tour et deviendront des acteurs reconnaissables au sein de la communauté sitôt que l'encéphale simiohumain des premiers millénaires se sera suffisamment développé pour que l'identité sociale du groupe se cherche des interlocuteurs grossis et extérieurs. Mais il aura fallu attendre Lévy-Bruhl, mort en 1939, pour étudier la mentalité dite "projective" de nos congénères quadrumanes. Et pourtant, une anthropologie fécondée par la connaissance des animaux hyper socialisés que nous sommes devenus ne débarquera dans la psychanalyse, puis dans la sociologie et dans la science historique qu'avec Fromm, décédé en 1980, comme si le phénomène psycho-cérébral originel de la personnification du monde extérieur n'était pas demeuré vivant au sein de toute la civilisation antique, puis chrétienne et enfin pseudo scientifique d'aujourd'hui, qui projette encore le mythe d'une rationalité en soi de la matière dans le tissu constant, donc prévisible, donc exploitable des coutumes imperturbables du cosmos: on croit encore que les redites aveugles de l'inerte rendent l'univers rationnel en soi,donc "parlant".

Comment le singe cérébralisé construit-il le verbe comprendre sur le rentable?

La semaine prochaine, j'essaierai de raconter notre évolution cérébrale, afin de tenter d'articuler la notion de décadence avec l'histoire de l'encéphale de notre espèce.
Le 31 octobre 2010.

Lien de l'article: http://pagesperso-orange.fr/aline.dedieguez/mariali/palestine/betes/bete.htm

Fouiller les décombres entraîne les Gazaouis vers la dangereuse « zone tampon »

Publié le vendredi 29 octobre 2010 sur le site info-palestine.net
par Mel Frykberg - E.I

Passage d’Erez, Bande de Gaza occupée (IPS) - La scène se produit au niveau du tunnel à armature métallique, reliant la partie israélienne de la frontière au nord de Gaza, en direction du point de contrôle palestinien où plusieurs groupes de jeunes gens et garçons palestiniens apparaissent fouillant dans les tas de décombres.

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Sur la photo : Un adolescent Palestinien a reçu une balle à la cheville alors qu’il fouillait à la recherche de matériaux de construction, octobre 2010 (Anne Paq/ActiveStills)

Ces décombres sont le résultat de l’invasion militaire israélienne sur Gaza, menée de décembre 2009 jusqu’au mois de janvier 2010 et dénommée « Opération Plomb Durci ». Détruites et bombardées, les maisons palestiniennes cèdent la place à un décor marqué par des restes de béton brisé et de métaux difformes.

Tout à coup, plusieurs coups de feu retentissent. Les tirs proviennent des tours de surveillance militaires israéliennes et visent les jeunes qui se trouvaient à quelques centaines de mètres de là. Pour rappel, Israël avait notifié et délimité une zone de sécurité de 300 mètres entre la clôture de la frontière et le nord de Gaza.

Depuis la fin de l’opération Plomb Durci, les coups de feu israéliens dans la zone tampon ont fait au moins 25 morts Gazaouis, dont six enfants, et quelques 146 blessés.

Dans un rapport du mouvement Defense for Children International(i), il a été mentionné qu’au cours du trimestre passé, dix jeunes palestiniens ont été la cible de tirs ; le plus jeune d’entre eux n’avait que 13 ans, alors que le plus âgé n’en avait que 17. Les animaux, eux aussi n’ont pas été épargnés puisque trois chevaux et un baudet ont été abattus.

En fait, d’après le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires (Office for the Coordination of Humanitarian Affairs - OCHA) : « Il y a une grande ambiguïté et un manque de transparence flagrant quant à l’exactitude des frontières des zones à accès restreint, des conditions qui dictent les raisons d’un éventuel refus ou acceptation d’accès à ces zones ainsi que les conséquences d’une entrée illicite ».

« S’agissant des frontières, l’armée israélienne avait physiquement et manifestement manqué de tracer les zones à accès restreint, bien qu’elle y mène des incursions au sol à raison de trois ou quatre fois par semaine ».

Par ailleurs, Karl Shembi, représentant d’Oxfam(ii) à Gaza rapporte à l’IPS que, outre les fermiers empêchés de cultiver leurs terres (représentant plus de 30% des terres très fertiles de la Bande), les palestiniens qui ramassent des débris dans le but de les recycler sont ciblés par des tirs, parfois mortels, des soldats israéliens du haut des 1500 mètres de la clôture.

Dans ce contexte, Shembri ajoute : « Non seulement les palestiniens se voient privés des matériaux de construction, mais ils sont pris pour cible par les balles israéliennes pendant qu’ils essaient de pallier la pénurie intolérable en recyclant ce qui reste de leurs maisons et usines détruites ».

Aussi, il a été rapporté par le groupe de droits israéliens « Gisha(iii) » qu’actuellement, seulement 4% du besoin en matériaux de construction est autorisé à accéder à Gaza ; un fait ayant encouragé quelques mouvements d’aide internationale à projeter la construction de stations d’épuration, de puits et de centres de loisirs. Toutefois, la plupart des maisons et des commerces des Palestiniens restent endommagés ou bien détruits.

Cette situation affecte aussi les écoliers. Ainsi, ne parvenant pas à satisfaire les fortes demandes d’inscription, l’Office de Secours et de Travaux des Nations Unies pour les Réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) avait été contrait de refuser quelques 40.000 enfants gazaouis, en droit de s’inscrire dans ses écoles pour cette année scolaire et ce, faute de pouvoir construire 100 nouvelles écoles. L’insuffisance de classes a poussé la plupart des écoles de Gaza à organiser des doubles vacations dans des classes pouvant accueillir jusqu’à une cinquantaine d’étudiants.

Outre la construction et l’éducation, l’agriculture. En effet, OCHA cite que depuis juin 2009, un total de 46% des terres agricoles dans la Bande de Gaza ont été jugées inaccessibles ou non productives en raison des destructions engendrées par le Plomb Durci et des zones à accès interdit qui longent la zone tampon de sécurité.

A l’intérieur de la zone tampon s’étend une zone le long de la frontière nord et Est avec Israël. Evaluée au tiers des terres cultivables de la Bande de Gaza, la zone reste, cependant, interdite d’accès aux fermiers et aux éleveurs. Il convient de rappeler que l’IPS avait été, à maintes reprises, témoin des scènes où ces nombreux garçons, travaillant à proximité de la frontière, reçoivent des balles dans les jambes ou dans les bras et ce, en guise d’avertissement.

Telles sont donc les marques de la pauvreté et du chômage humiliants à Gaza. Dans un climat où 80% de la population sont tributaire de l’aide alimentaire, et conformément aux standards de vie dans la Bande de Gaza, ces adolescents mettent leur vie en péril et au risque de perdre un bras ou une jambe, ou même la vie, ils tentent de gagner des revenus avantageux.

En effet, le travail quotidien éreintant qu’ils accomplissent, du matin au soir, en train de récupérer les gravats et de ramasser les bribes et morceaux de métaux est rémunéré à environ $40 net. Pourtant, quelques sites de collecte se trouvent à l’intérieur de la zone tampon. Très souvent, des morceaux et déchets de béton déterrés, broyés puis mélangés de nouveau pour obtenir des briques, de qualité médiocre, sont vendus aux entrepreneurs et aux usines ; ce qui a rendu la collecte de débris une activité relativement lucrative.

C’est pourquoi, le nombre des Gazaouis à s’aventurer dans la zone tampon ne cesse s’élargir.

Notes :

- i) DEI : Organisation non gouvernementale indépendante pour la protection des droits des enfants sur les plans mondial, régional, national et local. Œuvrant pendant plus de 30 ans, elle est représentée dans 40 pays à travers le monde. Son secrétariat est basé à Genève, Suisse.
- ii) Association internationale de 14 organisations travaillant ensemble dans 99 pays et en collaboration avec des partenaires et des alliés dans le monde entier pour trouver des solutions durables à la pauvreté et à l’injustice.
- iii) Organisation israélienne à but non lucratif fondée en 2005. Son objectif est d’œuvrer pour la liberté de mouvement des Palestiniens, surtout pour les habitants de Gaza.

Du même auteur :

- La discrimination israélienne éloigne les enfants palestiniens de l ’école - 28 septembre 2010
- Multiplication des dépôts de plainte contre les criminels de guerre israéliens - 3 novembre 2009
- La cassure entre la Turquie et Israël sert la Palestine - 18 octobre 2009
- Les manuels scolaires ne sont plus qu’un rêve - 30 septembre 2009

20 octobre 2010 - The Electronic Intifada - Vous pouvez consulter cet article à :
http://electronicintifada.net/v2/ar...
Traduction de l’anglais : Niha

URL de l'article: http://www.info-palestine.net/article.php3?id_article=9608